Voilà qui ne risque pas d'apaiser la controverse. Aux États-Unis, où l'usage de la reconnaissance faciale par les forces de l'ordre soulève de grandes interrogations, une entreprise admet avoir déjà fourni plus de 1 500 postes de police et organisations fédérales en caméras mobiles, potentiellement dopées à l'IA.
Un pas que Axon, leader du marché des caméras embarquées à destination des forces de police s'est toujours refusé à franchir, évoquant « de sérieuses craintes éthiques ». L'entreprise Wolfcom, elle, semble moins regardante sur ces considérations.
La reconnaissance faciale devient mobile
Wolfcom aurait déjà vendu ses caméras embarquées à plus de 1 500 départements de police et autres organisations fédérales au pays de l'Oncle Sam. Une information a priori des plus banales, mais que les découvertes du média OneZero agrémentent d'un détail délicat : l'entreprise développe des programmes de reconnaissance faciale à destination de ces mêmes caméras.Une initiative, écrit OneZero, qui fait de Wolfcom le premier constructeur de caméras embarquées américain à assumer poursuivre le développement de la reconnaissance faciale à destination des forces de l'ordre.
« Avec Realtime Facial Recognition (le nom du logiciel en développement), WOLFCOM espère donner à nos amis de la police des outils qui les aideront à identifier si la personne à laquelle ils parlent est un suspect, un disparu ou une personne d'intérêt », aurait écrit Peter Austin Onruang dans un email destiné au département de police de l'Oklahoma en mai 2019.
Un email également suivi aux départements policiers de Los Lunas, du Nouveau-Mexique et de Bakersfield, en Californie, dans lequel le patron de l'entreprise demande aux forces de l'ordre de bêta-tester sa technologie.
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Une analyse des sentiments en temps réel
Toujours dans cette série d'emails obtenue par OneZero, Wolfcom invite ses interlocuteurs à prendre la mesure des bienfaits de son logiciel via une courte vidéo (disponible à cette adresse). Une présentation qui met en scène trois individus filmés par la caméra de Wolfcom, et dont le profil apparaît clairement sur un moniteur.La personne de gauche est ainsi identifiée comme « personne disparue », de genre féminin, de 24 ans, et dispose d'un score de « bien-être » de -13. L'homme de 33 ans à sa gauche est quant à lui sous le coup d'un mandat d'arrêt (score de « bien-être » de -20), et son voisin de 27 ans est recherché pour une agression.
Une démonstration en laboratoire des plus concluantes, mais qui ne correspond pas vraiment aux performances actuelles du logiciel. Selon un représentant de la police de Los Lunas interrogé par OneZero, il faut pour le moment prendre en photo le visage de la personne et la mettre en ligne sur une application Android dédiée mise à disposition des bêta-testeurs. On est loin de la promesse initiale, mais Wolfcom a une astuce pour motiver les forces de l'ordre : tous les commissariats qui acceptent de participer à la phase de test pourront utiliser le logiciel final gratuitement.
Restera à voir si les attentes des forces de l'ordre sont comblées par les promesses de Wolfcom qui, lui, ne s'avance sur aucune obligation de résultat, ni même ne communique sur les bases de données qui seront interrogées par son logiciel pour permettre l'identification des individus. Une opacité encore plus inquiétante lorsque l'on ignore même si l'algorithme utilisé par Wolfcom est développé par ses soins ou loué à une entreprise tierce.
Source : OneZero