Hadopi : le juge peut ne pas enquêter

Olivier Robillart
Publié le 06 septembre 2010 à 11h25
Alors que même la date des premiers envois d'e-mails n'est pas réellement définie (entre fin septembre et mi-octobre), on commence à y voir un peu plus clair quant à l'architecture juridique de la loi et surtout comment se passeront concrètement les choses. Même si le passage devant le juge est obligatoire, l'audience ne pourrait être qu'une formalité...
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Pour mieux comprendre la « procédure Hadopienne », il est important de se rappeler que ce sont les ayants-droit qui dresseront un PV contre un internaute. Une fois que ce Procès-verbal est édité, il est transmis à l'Hadopi qui va juger de son bien-fondé. Ensuite, le juge doit mener les débats, et l'accusation (le ministère public) faire une enquête. En principe.

En réalité, les choses seront bien différentes puisque cette accusation devra simplement se servir des éléments constitutifs de la faute d'un internaute pour prononcer sa condamnation. Plus précisément, la circulaire à destination des parquets publiée par le ministère de la Justice le 31 août au Bulletin Officiel (repris par le blog C-Logeek), explique qu': « il conviendra d'éviter, sauf cas particulier, qu'une seconde enquête soit diligentée par ces services lorsque les éléments fournis par la Hadopi sont suffisants pour caractériser la contravention de négligence caractérisée à l'égard du titulaire de la ligne et pour assurer le caractère contradictoire de la procédure ».

Le juge pourrait donc se contenter de relire le PV dressé uniquement par les ayants-droits afin de prononcer sa condamnation. Une hypothèse plutôt désagréable au regard de l'histoire d'Hadopi. Pourtant, le recours au juge était une notion capitale lors des débats sur la loi. La première version du texte Hadopi a même été invalidée par le Conseil constitutionnel sur ce même motif. On se demande donc pourquoi cette circulaire vient aplanir tant de débats et adoucir les critiques des garants de la Constitution française.

D'un autre côté, cette vision pessimiste s'avère être logique dans le sens où le recours au juge devait forcement s'accompagner de mesures servant à fluidifier la procédure Hadopi. Il est impossible sous peine d'être écrasée sous sa propre lourdeur que l'Hadopi puisse confier chaque plainte à un juge afin qu'il les examine pleinement pour apprécier sereinement la culpabilité d'un internaute, sans logiciel de sécurisation « labellisé ». Résultat, le juge devra faire un rapide compromis s'il ne souhaite pas être submergé par les dossiers.
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Pour autant, bien que cette circulaire n'ait pas réellement de force juridique, cette volonté d'aller vite pourrait bien connaître ses limites. Un accusé pourrait, par exemple, juger que son procès n'est pas équitable et donc repousser ses audiences. De même, un internaute pourrait demander l'aide de conseils juridiques gratuits pour former sa défense au tribunal. Certains sites comme SOS-Hadopi mais également un conciliateur de justice ou des associations juridiques locales peuvent ainsi intervenir.

Des aides que l'Hadopi voit d'un mauvais œil, samedi, son secrétaire général Eric Walter s'est même fendu d'un communiqué jugeant le site Sos-Hadopi comme « un service commercial. Ces affirmations sont totalement mensongères. L'Hadopi s'opposera résolument à toute tentative de désinformation qui ferait de l'usager l'otage de querelles idéologiques ». Soit, mais les querelles juridiques pourraient avoir raison du dispositif de la loi...

Précision : Article modifié à 13h12 sur le rôle du magistrat du parquet (ministère public), seul habilité à mener l'accusation lord 'un procès.
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