Selon ces industriels, la Commission a continué à augmenter la taxation de ces supports sans prendre en compte de nombreux facteurs. Par exemple, en matière de vidéo, les responsables regrettent la multiplication des verrous numériques apposés sur les DVD qui ne permettent donc pas de copier un film légalement (sans casser la protection). De même, ils rappellent que le domaine de la copie privée doit être entendu de manière stricte.
Pour rappel, la redevance pour copie privée est payée par le consommateur lors de l'achat de supports de stockages ou d'appareils permettant de conserver des données multimédia sauvegardées et achetées. Par principe, elle vise à compenser les effets du droit à la copie privée (une exception au principe du droit d'auteur) de chacun pour un contenu numérique. Cette taxation se base sur des barèmes, eux-mêmes qualifiés en fonction d'études d'usages sur la consommation légale des utilisateurs. Le téléchargement illégal est donc clairement exclu.
86 millions d'euros prélevés par an pour la vidéo
Pourtant, selon le Simavelec et le SNSII, ces études d'usages ne tiennent pas compte des réalités. Ils ont donc réalisé leur propre étude. Ce rapport utilise ainsi la méthode de la SACEM lorsqu'elle calcule l'impact du piratage sur l'industrie culturelle. Réalisé par Terra Consultants et utilisant des chiffres du Procirep (Société des producteurs de cinéma et de télévision), le rapport explique qu'en matière de vidéos, peu de films sont copiés ou enregistrés légalement.
Sur la base de ces chiffres transmis par les ayants-droit relatifs à la diffusion en télévision, sur 1 000 personnes qui regardent un film (ou une série) sur la télévision gratuite, seulement 14 d'entre elles le copient via un lecteur ou un enregistreur. Selon cette méthode certes contestable mais dont le but est de toucher du doigt l'écart qui existe entre les montants actuellement prélevés et les pratiques des français, le préjudice est ensuite calculé notamment en fonction notamment de l'éventualité d'acheter un produit s'il n'était pas possible de le copier (ce paramètre est ici appelé le taux de substitution). Selon les responsables, ce préjudice est évalué à 0,37 million d'euros par an seulement contre 86 millions d'euros actuellement prélevés au titre de la copie privée (et 46,5 millions d'euros contre 85 millions pour l'Audio).
Pour Bernard Heger, secrétaire général du Simavelec, cet écart est intolérable. Il explique : « Actuellement, on paie le piratage et non la Copie privée puisque nous notons des écarts entre la méthode de calcul de la Sacem et la rémunération qui est actuellement en place. Notre objectif est donc de partir sur de nouvelles bases de calcul du préjudice de la seule copie privée licite ». Pour ce faire, les représentants souhaitent donc qu'une nouvelle autorité indépendante puisse fixer le montant des sommes prélevées.
Vers une nouvelle autorité indépendante sur la fixation de la redevance
Pour le Simavelec, la délégation du pouvoir de fixer les barèmes à une autorité indépendante (comme la Cour des Comptes ou la Commission de contrôle des SPRD ou ayants droit) aurait pour conséquence de « déconnecter » cette préoccupation de tout esprit partisan. En effet, ni les ayants droits, ni les industriels ou les représentants des consommateurs ne pourraient agir de manière directe sur cette fixation.
« Nous aurons donc besoin d'une nouvelle loi. Nous sommes dans une période politique qui permet cette remise à plat » commente Marc Héraud, délégué général du SNSII. La mise en place d'une telle structure devra en effet passer par la case législative. Dans cette optique, le gouvernement pourrait être poussé par le Conseil constitutionnel à revoir intégralement le dossier de la Copie privée. En février dernier, le Simavelec avait d'ailleurs saisi le Conseil d'Etat afin qu'il transmette une Question prioritaire de constitutionalité aux neufs Sages. Ces derniers doivent rendre leur décision avant le 16 aout prochain au sujet de l'obligation d'exonérer les professionnels du paiement de la Copie privée.
Si le Conseil constitutionnel juge que l'article 6 de la loi du 20 décembre 2011 (sur les professionnels) n'est pas conforme, c'est l'ensemble du système actuel de la copie privée qui devra être intégralement revu. Les ministres Aurélie Filipetti (Culture) et Fleur Pellerin (Economie numérique) mais également Sylvie Hubac (la directrice de Cabinet du président Hollande) auront alors pour mission de redéfinir les modalités de fixation de la redevance.
Les ministres mais également les députés devront ainsi équilibrer le nouveau système en répondant non seulement aux attentes des consommateurs et des industriels (pour une taxation plus faible) mais également du milieu culturel. Ce dernier pourrait d'ailleurs être tenté de freiner toute baisse significative des recettes puisqu'actuellement 25 % des montants perçus au titre de la copie privée sont utilisés pour l'organisation d'évènements culturels sur l'ensemble du territoire...