Véritable plat de résistance du débat, l'intervention de Stéphane Richard, directeur général de France Telecom qui estime qu'il vaut mieux parler « d'Internet ouvert plutôt que de neutralité du Net ». Il confie sa position au sujet de l'encombrement des réseaux 3G : « iPad d'Apple qui utilise la 3G va poser de grosses questions en terme de bande passante. Derrière tout cela, il n'y a pas de magie mais des réseaux qu'il faut construire, maintenir et développer. Internet c'est d'abord une question d'investissement, nous avons besoin en France d'entreprises qui investissent massivement dans le numérique. Ces entreprises ne peuvent être que les opérateurs ».
Plutôt bavard, le patron de France Telecom répond aux critiques concernant les offres « illimitées » de téléphonie et d'Internet mobile. Il précise : « les opérateurs ont fait trop usage d'offres qui ont été qualifiées d'illimitées. C'est une politique qu'il faut revoir car il s'agit non seulement d'un travail de vocabulaire mais aussi d'honnêteté. C'est un devoir. » Un petit pas pour l'opérateur, semble-t-il mais des termes qui vont en faveur d'une meilleure visibilité pour les utilisateurs.
Internet libre, concentré entre quelques (grosses) mains
Soucieux de poser les questions qui fâchent, Benjamin Bayart, président de French Data Network depuis 1997 conteste la concentration des activités numériques dans les mains de quelques grandes sociétés. Il lance : « La pratique de la liberté d'expression est totalement différente en France et aux Etats-Unis. Nous avons d'un côté des très gros (acteurs, firmes, ndr) qui diffusent des contenus en masse et de l'autre des internautes. L'Internet qui est décrit ici est exactement comme le Minitel. Il faut bien rappeler qu'il faut cinq gus dans un garage pour pouvoir développer le Net. De nos jours, le problème est que l'on vend n'importe quoi sous le terme Internet... »
Le responsable met le doigt sur deux visions radicalement opposées du Net. D'une part, les tenants d'un Web totalement libres, de l'autre des sociétés qui cherchent à établir un contrôle logique de leurs réseaux. Pour autant, suite à la saisine du Conseil constitutionnel et après les débats portant sur la loi Hadopi, les sages avaient décidé d'intégrer le droit à l'Internet dans l'article 11 de la Constitution. Ce droit devenant ainsi fondamental.
NKM rappelle poids du gouvernement
La secrétaire d'Etat à l'Economie numérique, Nathalie Kosciuzko-Morizet tient, pour sa part à rappeler que le gouvernement consacre pas moins de 4,5 milliards d'euros pour le numérique dans le cadre du Grand emprunt (rebaptisé Investissement d'avenir). Elle tient à intégrer la « dimension politique et sociétale. Je ne suggère pas de remise en cause de la neutralité du Net, mais il y a des défis importants à venir comme la migration vers le très haut débit. Les opérateurs devront consentir à des investissements considérables. Elle scrute du regard, Stéphane Richard (le DG de France Telecom, ndr) est parti mais il l'entendra... »
Si selon ses mots, « La neutralité du net ne doit pas être le point Godwin de l'activité numérique », il est certain que les personnes autour de la table vont devoir établir un équilibre entre application de la loi sur Internet et les pratiques des internautes. A ce sujet, la secrétaire d'Etat lance « On ne remplace pas l'humain par la machine dans l'application de la loi car cela entraine un risque de confusion avec les usages légaux ». Les lettres et autres e-mails dans le cadre de la loi Hadopi devraient donc se faire à la main. Pour rappel, l'ex-ministre de la Culture évoquait l'envoi de 100.000 e-mails dès la mise en place de la loi. Courage...