La loi prostitution concerne aussi les annonces en ligne

Alexandre Broutart
Publié le 13 avril 2016 à 15h00
Adoptée le 6 avril en lecture définitive, la loi « visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées » prend à rebours le modèle amstellodamien (d'Amsterdam) qui légalise et encadre la prostitution. La nouvelle législation française condamne au contraire les clients à une contravention de cinquième classe, et à 3 750 euros d'amende pour récidive. Mais le texte ne s'arrête pas là, et étend la sanction au fait de solliciter des relations de nature sexuelle « en échange d'une rémunération, d'une promesse de rémunération, de la fourniture d'un avantage en nature ou de la promesse d'un tel avantage. »

Les sites de petites annonces en ligne font souvent face à une contamination des annonces par des propositions douteuses ou qui font explicitement état de rapports physiques tarifés, les incitant parfois à créer des catégories « érotiques » pour mieux en séparer les annonces traditionnelles. Outre la non responsabilité juridique de ces plateformes quant au contenu des publications, les modérateurs veillent et retirent bon nombre d'annonces jugées malsaines.

La nouvelle loi condamne donc désormais la proposition avérée de marchandage sexuel, mais elle ne précise pas quel cas sera fait de toutes les demandes insidieuses et sous-entendues. Au chapitre des « colocations » par exemple, il n'est pas rare de trouver des annonces d'hommes qui offrent la gratuité de leur logement - en leur compagnie -, en échange de « services », précisant bien-sûr que l'annonce ne s'adresse qu'à des femmes, des « jeunes filles », ou des « étudiantes ». Avec la crise du logement, en particulier dans les grandes villes, il n'est pas improbable que ce type d'annonce rencontre malheureusement un certain succès, de par l'attractivité économique des propositions.

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Cette annonce vue ce jour sur une plateforme populaire, sera désormais passible de sanction pénale.


Joute démocratique : le blocage des sites

La loi, qui préconise aussi un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale via tout un dispositif d'aides, insiste sur l'importance de la lutte contre le proxénétisme sur Internet. Mais comme souvent, ce champ de la régulation d'Internet a divisé : le premier article du texte législatif prévoyait un blocage administratif des sites proposant un accès à la prostitution, mais à l'initiative des députés Sergio Coronado (PS) et Barbara Pompili (Les Verts), un amendement adopté en première lecture proposait sa suppression totale, ce que le Sénat a ensuite rejeté, contre l'avis du gouvernement. De retour à l'Assemblée pour une lecture définitive, l'amendement a finalement été adopté.

L'objet de la discorde ne figure donc plus dans le texte final, notamment parce que ne sont pas encore connus les résultats du rapport très attendu relatif au blocage administratif des sites faisant l'apologie du terrorisme. Les auteurs de l'amendement expliquent aussi que le travail judiciaire est préférable au blocage systématique qui n'a pas la subtilité d'appréciation qu'un juge peut avoir : « La simple possession ou la diffusion d'images pédopornographiques constitue un délit, ce qui n'est pas le cas de petites annonces, qui nécessitent une appréciation, qui devrait relever du juge. »


Les députés ajoutent qu'« un blocage trop hâtif des sites pourrait être un frein à des enquêtes judiciaires ayant pour objet de lutter contre les réseaux qui sont derrière ces sites. » Malgré cela, la loi promulguera que soit étendue l'obligation faite aux hébergeurs et fournisseurs d'accès à Internet (FAI) de mettre en place des dispositifs de signalement des contenus ayant trait à la traite et au proxénétisme. Concernant le signalement des particuliers, chaque internaute a déjà le devoir citoyen de signaler ce type de contenus sur ce site, qui permet une saisine directe des services de police spécialisés.

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soixante_trois

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