La Ligue des droits de l'Homme et La Quatradure du Net ont déposé une requête devant le tribunal administratif de Marseille visant à faire suspendre le dispositif.
Deux associations, La Quadrature du Net et la Ligue des droits de l'Homme, ont annoncé avoir déposé, il y a quelques jours, un recours en référé devant le tribunal administratif de Marseille, avec l'objectif de faire suspendre dans les plus brefs délais le dispositif de « vidéoprotection intelligente » mis en place dans la cité phocéenne depuis la fin de l'année 2019.
Une vidéosurveillance aux nombreuses propriétés
Le dispositif, dont les détails ont été révélés par la Ville de Marseille dans un article publié par nos confrères de Télérama le 11 décembre dernier, vantait l'installation d'un logiciel de surveillance déployé sur une cinquantaine de caméras déjà installées. Conséquence d'un appel d'offres lancé en 2015 par la municipalité, elle avait été remporté par le groupe SNEF, une société marseillaise spécialisée dans les solutions de vidéosurveillance.Les associations qui demandent le retrait du dispositif pointent du doigt les utilisations prévues par cette vidéoprotection intelligente. Celle-ci devrait permettre notamment un traitement automatique des données permettant de détecter des incidents, des anomalies ou des faits remarquables. On note aussi la possibilité de détecter des anomalies non identifiables par un opérateur humain rattaché au Centre de supervision urbain, outre la gestion de l'espace public et l'analyse des piétons, des véhicules et des comportements. Mais ce n'est pas tout.
Les caméras équipées du dispositif fourni par la SNEF peuvent détecter des graffitis, des objets abandonnés et détecter tout vol, disparition ou destruction de mobilier urbain.
La ville à la limite de la légalité ?
Un traitement des données biométriques est également prévu, notamment pour aider à résoudre certaines affaires judiciaires. Le dispositif peut ainsi utiliser des filtres pour recherche un individu automatiquement en fonction de sa description, de son avatar et de sa photo. Les équipements déployés à Marseille sont en outre équipés de capteurs sonores, ce que la CNIL avait déjà dénoncé du côté de Saint-Etienne.Lorsque le journaliste de Télérama a eu vent de l'installation du dispositif sur la ville de Marseille, la CNIL n'avait pas été mise au courant. Ce qui place la municipalité dans l'illégalité, n'ayant pas suffisamment respecté les libertés fondamentales défendues ici par La Quadrature du Net et la Ligue des droits de l'Homme. L'utilisation des données biométriques (donc personnelles) est aussi illégale en ce que la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen, confortée par la Constitution, confie la surveillance de la voie publique à « la force publique ». En l'occurrence, Marseille ne respecte pas cette disposition puisque la mairie a délégué à une société privée une mission de surveillance généralisée de la voie publique.
La mise en place d'une vidéosurveillance automatisée est aujourd'hui sérieusement contestée. La CNIL a déjà rappelé à l'ordre la région PACA il y a quelques mois pour l'utilisation de dispositifs de reconnaissance faciale dans des lycées de Nice et Marseille.
Il n'existe pour l'instant pas de cadre juridique réel autour de la vidéosurveillance automatisée, alors que ce dispositif satisfait les partisans de la sécurité d'un côté, et inquiète les défenseurs de la vie privée et des libertés de l'autre.
Source : La Quadrature du Net