Élaborerons-nous bientôt des objets complexes aussi simplement que l'on imprime un document ? Les spécialistes de l'impression 3D, toujours plus nombreux au CES de Las Vegas, veulent y croire, et rivalisent d'ingéniosité pour concevoir des machines dont le coût de revient rend envisageable la commercialisation auprès du grand public. L'impression 3D, ou impression relief, consiste pour mémoire à faire fabriquer un prototype à partir d'un modèle en trois dimensions. L'imprimante travaille le plus souvent à partir d'un filament de plastique qui sera chauffé, puis déposé par couches successives sur la surface réservée à l'impression jusqu'à former l'objet désiré. Selon les modèles, la précision peut atteindre 10 ou 20 microns, même si sur les modèles les plus abordables, l'échelle est plus de l'ordre de 0,5 mm. Axes et buses d'extrusion, on retrouve bien le concept de l'impression, avec ici un objet en 3D qui sera découpé en plans successifs par le logiciel associé.
Parmi les sociétés qui ont contribué à faire connaître ce concept, en développement depuis les années 80, on trouve notamment le français Scultpteo, qui ne commercialise pas directement des imprimantes, mais propose en revanche un service d'impression à la demande avec, dernière nouveauté en date, la possibilité de faire peindre la coque iPhone personnalisée que l'on aura commandée. Similaire sur le principe, l'américain Shapeways opère quant à lui une véritable place de marché, sur laquelle les créateurs pourront enregistrer et vendre des modèles d'objets qui seront ensuite fabriqués et expédiés par la société. Fondée en 2007, celle-ci a levé 6 millions de dollars en juin dernier pour développer ses activités, et revendique déjà plus de 150 000 utilisateurs enregistrés.
La prochaine étape sera-t-elle celle de l'imprimante 3D personnelle, que l'on achète et installe chez soi ? Les spécialistes du secteur n'en doutent pas, et affirment que, essor du marché aidant, les machines aujourd'hui réservées aux professionnels finiront par être accessibles à tout un chacun. Au CES, Afinia présente par exemple une machine suffisamment sophistiquée pour produire un buste miniature de Yoda à partir d'un filament de plastique. Le prix, ici, s'établit aux alentours de 1500 dollars pour une précision de l'ordre de 0,2 mm, auxquels il faudra ajouter environ 32 dollars pour chaque Kg de plastique (ABS) consommé. Celui-ci est fourni sous forme de rouleaux, déclinés en plusieurs coloris, et l'ensemble vient livré avec un logiciel permettant de concevoir ses propres modèles.
MakerBot suit une logique similaire avec son Replicator 2, dont l'encombrement représente à peu près celui d'un gros four à micro-ondes. Le travail se fait ici encore via des buses d'extrusion, mais à partir d'un plastique différent, le PLA, élaboré grâce à la polymérisation de la dextrose. Le matériau présente donc l'intérêt d'être d'origine naturelle, et offrirait selon MakerBot une résistance suffisante pour que l'on puisse envisager d'imprimer des pièces 3D susceptibles d'être soumises à des contraintes mécaniques.
Plus ambitieux sur le plan technique, Formlabs lance lui une imprimante qui fait appel à un procédé de fabrication différent, la stéréolithographie, à savoir le travail au laser d'une résine photosensible, avec ici une précision revendiquée de l'ordre de 25 microns. Lancé par des anciens du MIT, le projet a fait l'objet d'une levée de fonds collaborative via Kickstarter, qui a attiré près de 3 millions de dollars d'investissements. Les matériaux coûtent ici plus cher (la résine sera vendue aux alentours de 150 dollars le litre), mais le résultat serait, selon Formlabs, comparable à ce qu'on obtient aujourd'hui avec les machines professionnelles dédiées au prototypage, vendues trois fois plus cher. Son imprimante, baptisée The Form 1, est proposée à la précommande à 3300 dollars environ.
Pour les bricoleurs qui souhaiteraient s'initier à moindres frais et n'ont pas peur d'avoir à assembler leur machine eux-même, des kits d'impression 3D existent déjà à des tarifs plus abordables. Le français eMotion Tech en commercialise par exemple à des prix compris entre 500 et 700 euros, investissement auquel il faudra tout de même ajouter la somme nécessaire à l'achat d'une alimentation, ainsi que des accessoires indispensables.
Technologies concurrentes, multiplication des acteurs et prix qui, trente ans après la formalisation du concept, commencent à devenir accessibles, l'impression 3D n'attend finalement plus que ses premiers adeptes. Si les usages ne manquent pas dans l'univers professionnel (designers, fabrication de pièces de rechange, etc.), reste à savoir si le grand public s'en emparera, et à quelles fins.
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