Près de neuf cyberacheteurs français sur dix consultent les avis d'autres clients avant de valider une commande, selon une étude Reevoo/GMI Research. Ils sont 70% à adopter ce comportement avant d'acheter une voiture et 50% avant de choisir une compagnie d'assurance. Très influents, les avis sont, selon cette enquête, plus écoutés que les articles de presse : seulement 22% leur font confiance avant d'acheter en ligne. Ainsi, la moitié des cyberacheteurs a déjà posté des avis. La France est très active en la matière en Europe, avec un avis publié pour 40 internautes, contre un ratio de un pour 60 en Grande Bretagne et un pour 110 en Allemagne.
Si l'intérêt est évident pour le consommateur, il est aussi bien compris du côté du e-commerçant. Selon Tom Brami, directeur de AvisCertifiés.com, « les avis favorisent entre 15 et 20% le traux de transformation des visiteurs en acheteurs ». D'où l'importance que ces commentaires soient de qualité. Sa société, en l'occurrence, se place en « tiers de confiance ». Son rôle est de récolter les avis après une transaction puis de les afficher sur les fiches des produits concernés, après les avoir vérifiés.
Dans la même veine, la société danoise TrustPilot reflète l'importance qu'a pris la recommandation dans le pays : il est devenu le deuxième le plus consulté parmi les sites danois. Sa plus-value, fait valoir Brahim Ben Helal, chargé des ventes pour la France, est que « les avis récoltés après les transactions sont intégrés aux fiches de chaque marque sur une plateforme unique. Cela permet de centraliser les commentaires afin que les marques et les internautes puissent échanger entre eux, leur offrant du coup une expérience sociale ». Près de 38 000 marchands y sont présents, pour 5,7 millions d'avis collectés à travers l'Europe.
Un risque existe, prévient-il. « Certaines sociétés filtrent les commentaires négatifs sous l'influence de leurs clients, du coup cela ne reflète pas leur réelle e-reputation ». « Quand de mauvaises notes sont attribuées, cela peut pourtant être positif pour les marques. Parfois elles me contactent et me demandent conseil, je leur réponds de prendre ces avis en compte et de résoudre le problème. Ensuite, les internautes reviennent et sont contents », affirme Brahim Ben Helal.
En sus des filtrages volontaires, certains acteurs du e-commerce n'hésitent pas à innonder le flux de commentaires avec de fausses contributions. « Entre 2011 et 2012, sur 130 sites contrôlés par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, 12 procédures ont été transmises au Parquet car ces sociétés ne respectaient pas la loi en la matière », indique Tom Brami. Une étude menée par Gartner prévoit que 10 à 15% des contributions sociales seront des commandes d'entreprises d'ici à 2014, y compris via les réseaux sociaux. Selon Brahim Ben Helal, « on a déjà dépassé ce chiffre aujourd'hui ».
Vers une socialisation du shopping en ligne
Pour bénéficier d'avis authentiques, le mieux est peut-être de connaître les personnes qui les rédigent. Pour cela, plusieurs initiatives émergent, intégrant les réseaux sociaux et donc l'entourage du cyberacheteur. La démarche ne repose pas sur du vent : 53% des internautes Français sont influencés par leurs amis sur Facebook avant d'acheter un produit, d'après GMI Research.
Si TrustPilot et AvisCertifiés.com permettent de partager ses commentaires sur son mur Facebook et sur la page fan de la marque, d'autres plateformes tentent une autre approche. L'éditeur de moteurs de recherche thématique Quaelead lancera bientôt JolieList.com. Mathilde Le Rouzic, p-dg du groupe, explique que « de plus en plus de gens ont besoin de recommandations de proches, dont les modes de vie ne sont pas éloignés. Ils ont besoin de cette dimension sociale ».
Pour y parvenir, JolieList.com, bientôt disponible en version bêta, proposera de faire le tri dans les offres. Il reviendra à chaque internaute de mettre en favori des produits glanés sur le Net pour qu'ils apparaissent dans des listes sur la plateforme, un peu comme sur Pinterest. « Chacun aura ainsi sa communauté, via une inscription par e-mail, Facebook ou Twitter, qui pourra s'exprimer sur les listes, dans une logique de social shopping », explique Mathilde Le Rouzic. Celles-ci seront privées ou publiques.
D'autres tentent d'investir le terrain des guides d'achat sociaux, comme Chalala. Le projet d'Hugo Douchet ambitionne de rassembler une communauté de cyberacheteurs sur une même plateforme. À terme, le site essaiera d'essaimer des modules de commentaires sur les sites e-commerce. Le but du fondateur est « de bénéficier d'avis, mais de ses amis ».
Avec 15 millions de visiteurs uniques par jour, le modèle de Pinterest fait mouche. Mais, « le business model se cherche encore », tempère la p-dg de Quaelead. L'avantage de JolieList.com est de pouvoir reposer sur les moteurs thématiques du groupe, qui n'ont pas de problèmes de monétisation. « Incompatible » avec le social shopping, Mathilde Le Rouzic réfute toute hypothèse d'affiliation. « Pour que ce système rapporte, il faut faire du gros volume, or la plupart des liens portent sur des produits grand public, alors que le shopping social, tel que nous le concevons, cible plutôt des biens plus confidentiels », explique-t-elle.
Si les plateformes de recommandation sociale ne dépendent pas de l'offre « mainstream », elle peuvent avoir une carte à jouer sur les produits de niche. En effet, la plupart des sites e-commerce en France sont de petite taille, réalisant moins de 500 commandes par mois. Une boutique se crée toutes les demi-heures dans le pays.