Le gouvernement français avait suscité un grand nombre de critiques avec son projet Alicem, un système de reconnaissance faciale permettant de se connecter à certains services publics en ligne. En réponse à la controverse, l'État a décidé... d'avancer sa mise en place au mois de novembre prochain.
Le programme Alicem (« Authentification en ligne certifiée sur mobile ») est une initiative lancée par le ministère de l'Intérieur et l'Agence Nationale des Titres Sécurisés (ANTS). L'idée est d'exploiter la reconnaissance faciale pour créer une identité numérique pour chaque citoyen disposant d'un passeport biométrique.
Reconnaissance faciale pour identification facile
Concrètement, via une application mobile (uniquement sur Android pour l'instant), l'utilisateur sera invité à prendre des photos et des vidéos de lui, sous différents angles. Ces données seront ensuite envoyées pour comparaison avec les informations du passeport biométrique.D'après l'État, cette solution vise à simplifier l'accès aux services publics en ligne, à lutter contre le vol d'identité, à limiter l'envoi de données biométriques (qui seraient majoritairement stockées dans le téléphone et supprimées dès l'application désinstallée) et à empêcher le vol de ces mêmes données.
Alicem fait face à une vive opposition
Mais tout le monde ne l'entend pas de cette oreille. Ainsi, la CNIL a fait part de ses inquiétudes quant à ce nouveau système, affirmant qu'il était contraire au RGPD européen. Car ce règlement impose de recueillir le consentement libre et éclairé d'un utilisateur pour récolter des données personnelles. Or, dans le cas d'Alicem, aucune alternative ne serait envisagée. Le citoyen n'aurait donc d'autre choix que de donner son « accord » pour accéder aux services.De même, la Quadrature du Net a dénoncé la solution défendue par le gouvernement, accusant ce dernier de contribuer à la banalisation de la reconnaissance faciale. L'association a donc déposé un recours devant le Conseil d'État, pour empêcher son instauration.
Mise en place accélérée
Ces polémiques ont-elles poussé le ministère et l'ANTS à revoir leur copie ? Pas vraiment. Alors que le déploiement de l'application Android était initialement prévu pour décembre 2019, le gouvernement aurait décidé de prendre un mois d'avance, d'après des informations de Bloomberg. Et ce, malgré les interrogations de plusieurs observateurs quant à la sécurité du programme, qui n'a, par exemple, pas fait l'objet d'une campagne de bug bounty.Avec Alicem, la France serait le premier pays de l'Union européenne à disposer d'un système national d'identification via la reconnaissance faciale. Mais le recours à cette technologie est de plus en plus fréquent dans le monde. D'après un rapport de la Fondation Carnegie pour la paix internationale, au moins 75 pays (sur 176 étudiés) y auraient recours à des fins de surveillance. Bientôt 76, avec la France ?
Source : Naked Security