À l'aube de son introduction en Bourse, Uber reste frileux malgré des bénéfices flirtant avec le milliard de dollars en 2018, tout en livrant des détails sur son activité, dont son développement de véhicules autonomes et volants.
Début 2019 est animé par l'entrée en bourse de deux géants de la mobilité. Lyft a ouvert la route en mars, mais avec un résultat décevant. Levant plus de 2 milliards d'euros, la société américaine a fait son entrée à 72 dollars le 29 mars, mais ayant perdu 17 % de sa valeur en deux semaines. L'autre géant, Uber, va rapidement emboîter le pas à son concurrent.
Uber lève le voile sur sa santé financière
Uber a donc déposé dans la nuit de jeudi à vendredi son IPO, document financier, auprès de l'organisme américain SEC (Security Exchange Commission). Dans ce pavé de 399 pages figurent les comptes détaillés d'Uber, ainsi que son activité ou ses ambitions en matière de voitures autonomes et Uber Elevate.Les investisseurs s'annonçaient déçus sur une valorisation attendue inférieure à leurs attentes de 120 milliards de dollars (106 milliards d'euros). Ils ont été doublement surpris en voyant de l'objectif de la firme dirigée par Dara Khosrowshahi. Peut-être refroidi par Lyft, Uber a déposé la déclaration modeste de lever 1 milliard de dollars, alors les derniers calculs laissaient à penser que l'IPO serait plutôt de 10 milliards de dollars. Cette IPO était attendue dans le Top 5 américain, derrière General Motors (2010) et Facebook (2012) qui avaient levé près de 16 milliards.
Des bénéfices en trompe l'œil
En 2018, Uber a déclaré 11,27 milliards de dollars de chiffre d'affaires, +42 % par rapport à 2017, et le triple de 2016. Le service de VTC y a représenté 10 milliards, générés par 91 millions de clients actifs mensuels, contre 68 millions l'an précédent. Si la part automobile est encore supérieure à 90 %, Uber s'est diversifié avec Uber Eats et Uber Freights, et plus récemment ses trottinettes et vélos Jump en libre-service.Cependant, derrière les 997 millions de dollars de bénéfices (880 millions d'euros, vs 3,5 milliards de pertes en 2017), le résultat d'exploitation est encore clairement dans le rouge. La société californienne a enregistré un EBITDA négatif de 1,8 milliard de dollars, en recul toutefois par rapport aux 2,6 milliards de 2017. Autre point faible d'Uber : sa dépendance à l'Amérique du Nord. Les États-Unis et Canada représentent 61 % du chiffre d'affaires, contre 20 % en Amérique Latine, 17 % en Europe et 10 % en Asie.
Sur le terrain, la croissance semble exponentielle pour Uber, qui a enregistré son 10 milliardième trajet en septembre 2018. 5,22 milliards de trajets ont été enregistrés sur l'année, en hausse de 40 % par rapport à 2017. Ces trajets représentent 41,8 milliards de km parcourus ! En comparaison, la société a attendu 5 ans pour dépasser le premier milliard de trajet, en mars 2016.
Uber investit prudemment sur l'autonome et les taxis volants
En parcourant les résultats d'Uber, on note qu'un tiers du budget de recherche et développement - 1,5 milliard de dollars - a été attribué à ATG. Advanced Transport Group est la filiale chargée de développer les voitures autonomes, avec 457 millions de dollars dépensés (404 millions d'euros). Une somme vouée à augmenter, selon l'entreprise, « dans un futur proche » malgré l'accident mortel qui a défrayé la chronique en mars 2018.Avec actuellement 250 véhicules Volvo, Toyota et Mercedes en essais pour peaufiner la technologie, Uber est dans la course folle à la voiture sans chauffeur. Mais il fait office de lanterne rouge en termes d'efficacité, selon les données du DMV (département américain des Transports). Ses prototypes auraient effectué en moyenne 0,62 km sans intervention humaine, contre... 17 728 km pour Waymo (Google) ou 8 374 km pour Cruise (GM). Même Apple fait mieux qu'Uber avec 1,85 km en mode autonome.
D'où des déclarations très réservées dans le document remis à la SEC : « Dans le chemin nous menant à un monde de voitures autonomes, nous croyons qu'il y aura une longue période d'autonomie hybride [...] Dans des situations comme des bouchons, trajets complexes ou météo extrême, nous continuerons à faire confiance à nos conducteurs ». Un message à destination des entreprises croyant dur comme fer à l'arrivée du 100 % autonome dans les années 2020 ?
ATG regroupe aussi Uber Elevate, le futur service de taxis volants ou VTOL. Ceux-ci visent à éviter les bouchons en agglomérations, pallier les contraintes géographiques (baies, reliefs) et relier des centres-villes à leurs aéroports en quelques minutes. Ces engins volants devraient devenir réalité d'ici 2023, tandis que les premiers essais débuteront à Dallas et Los Angeles en 2020.
Source : SEC.