C'est la rentrée, et comme tous les ans, Google en a profité pour présenter ses nouveaux téléphones : le Pixel 8 et le Pixel 8 Pro. Mais au-delà de l'IA qui est partout sur ses téléphones, la vraie révolution annoncée par Google est la longévité logicielle.
Enfin un Pixel qui pense long terme. Lors de la conférence de présentation de ses Pixel 8 et 8 Pro, Google a conclu son tour des nouveautés par une information discrète, mais ô combien capitale : les nouveaux Pixel bénéficieront de 7 ans de mises à jour. Un changement de philosophie total pour Google, qui jusque-là n'était pas connue pour assurer une excellente longévité logicielle.
Des mises à jour jusqu'en 2030
Les nouveaux téléphones de Google pourront donc profiter des versions d'Android jusqu'en 2030 (jusqu'en octobre 2030, pour être précis). C'est aussi à cette date que les mises à jour de sécurité (qui corrigent les failles logicielles indépendamment des mises à jour majeures) cesseront d'être déployées sur les appareils. C'est mieux que les Pixel 7 et 7 Pro, qui proposent 3 ans de mises à jour majeures et 5 ans de mises à jour de sécurité, et bien supérieur aux Pixel premiers du nom, qui ne proposaient que deux ans de mises à jour majeures.
Il faut dire que Google était sous pression. Samsung promet désormais 4 à 5 ans de mises à jour sur ses mobiles Galaxy, tout comme OnePlus ou le fabricant Xiaomi. Mais ce sont bien évidemment les iPhone que Google a en ligne de mire avec cette politique. Apple est effectivement l'un des constructeurs qui proposent la plus longue prise en charge logicielle, avec des mises à jour proposées jusqu'à 5 à 7 ans après la sortie d'un produit.
Bon pour le portefeuille et la planète
Google est donc passée du statut de mauvais élève à celui de premier de la classe avec cette nouvelle politique de suivi. Et c'est une très bonne chose pour les futurs acheteurs et acheteuses, mais aussi pour la planète. Rappelons en effet qu'en France, selon un rapport du Sénat, « 70 % de l'empreinte carbone totale du numérique » est due à la fabrication des terminaux. Un smartphone qui dure plus longtemps et qui n'a pas besoin d'être remplacé à cause de problématiques d'obsolescence logicielle est un smartphone plus écologique par définition.
Techniquement, cela est sans doute rendu possible par le fait que Google emploie dans ses Pixel 8 une puce maison, la Tensor G3, qui lui donne plus de latitude quant aux fonctionnements combinés du matériel et du logiciel (c'est la fameuse « intégration verticale » prônée par Apple depuis longtemps). Côté matériel d'ailleurs, pour ne rien gâcher, Google s'est associée avec iFixit pour proposer au grand public des outils et des pièces détachées officielles.
Google peut (encore) mieux faire
Petit pas par petit pas, Google conçoit donc des téléphones plus durables à un moment où l'industrie en a désespérément besoin. Tout est-il rose pour autant ? Pas complètement. Dans ses calculs les plus optimistes, l'Autorité de régulation des télécoms en France estimait en 2021 que « la durée d'utilisation totale des terminaux mobiles pourrait vraisemblablement atteindre […] 10 ans », contre 2 à 3 ans aujourd'hui. Certes, les consommateurs et consommatrices ont une responsabilité dans ce rythme de renouvellement effréné, mais les constructeurs doivent aussi assurer une durée de vie minimum pour limiter le besoin de rachat qui épuise la planète.
On peut aussi saluer la nouvelle politique de Google tout en la mettant en perspective. Un constructeur comme Fairphone a aussi proposé 7 ans de mises à jour à son Fairphone 2 et en propose 8 pour son Fairphone 5. Si la firme néerlandaise parvient à un tel exploit malgré le fait qu'elle n'emploie qu'une centaine de personnes, nul doute que Google pourrait faire mieux avec ses milliers d'ingénieurs et de développeurs.
Il faudra également scruter la future note de réparabilité des Pixel 8 et 8 Pro ainsi que le prix des pièces détachées qui les accompagneront. Car un smartphone qui dure longtemps, c'est bien, mais s'il est impossible (ou beaucoup trop cher) d'en changer l'écran après une chute, alors cela limitera largement l'intérêt d'une telle promesse.
Rappelons que selon un rapport de l'ADEME publié en 2021, « le premier frein à la réparation des équipements gris [catégorie qui comprend les smartphones, ndlr] est le coût de la réparation par rapport au prix du produit neuf ». Cela explique pourquoi seulement 26 % (toujours selon l'ADEME) des pannes de smartphones hors garantie font l'objet d'une réparation.
Un exemple à suivre dans l'industrie
Enfin, plus prosaïquement, il faudra voir comment se comporteront les Pixel 8 après 7 ans de mises à jour successives. Souvent plus riches en fonctionnalités et plus gourmandes en ressources, les nouvelles versions d'Android peuvent parfois mettre le processeur d'un téléphone à genoux et le rendre, à grands coups de ralentissements et de bugs, plus pénible à utiliser, et donc plus susceptible d'être remplacé.
On ne peut cependant que saluer la décision prise par Google avec ses Pixel 8, car elle va indéniablement dans le bon sens. En plus, elle rend les Pixel beaucoup plus attractifs face à la concurrence, puisque potentiellement plus rentables sur le long terme.
Il ne reste plus au reste de l'industrie qu'à suivre le même exemple, et aux consommateurs et consommatrices de continuer d'exiger des smartphones toujours plus durables, plus réparables et plus abordables.