Vue d'artiste de la mission BepiColombo et ses moteurs électriques-ioniques. © ESA/ATG
Vue d'artiste de la mission BepiColombo et ses moteurs électriques-ioniques. © ESA/ATG

Depuis son décollage en 2018, la mission européenne et japonaise BepiColombo se fraie un chemin dans le Système solaire pour freiner avant de pouvoir entrer en orbite autour de Mercure. Mais ce printemps, il y a un souci sur le module de propulsion, les moteurs électriques ne reçoivent pas assez de puissance !

La mission BepiColombo, pour voyager jusqu'à Mercure, se compose d'un assemblage un petit peu particulier, avec un orbiteur japonais (MMO) attaché à un orbiteur européen (MPO). Pour que ces deux précieux éléments puissent rejoindre la planète la plus proche du Soleil, ils sont installés devant un troisième bloc, qui ne sert que pour les 7 années de transport et le freinage final, appelé le MTM (Mercury Transfer Module). Équipé de panneaux solaires, celui-ci utilise l'énergie qu'il collecte pour alimenter ses quatre moteurs électriques ioniques à très faible poussée. Très efficaces, ces moteurs produisent en continu, durant des semaines et des mois, quelques dizaines de millinewtons de poussée.

Au fil du temps, cela permet de freiner BepiColombo avec une énorme économie de masse, même si c'est toujours insuffisant pour rejoindre Mercure. Ces freinages viennent donc en complément des assistances gravitationnelles, pour lesquelles les différentes planètes du Système solaire intérieur ralentissent la mission de plusieurs milliers de kilomètres/heure... Malheureusement, lorsque les équipes ont voulu entamer une nouvelle séquence de manœuvres sur plusieurs semaines le 26 avril 2024, un problème d'alimentation est survenu et le MTM n'a fourni que quelques fractions de la puissance nécessaire pour ses 4 moteurs, lesquels n'ont pas pu fonctionner correctement.

Un droit à l'erreur très limité

Il s'agit d'un problème important, parce que les manœuvres avec les moteurs électriques ioniques et les survols gravitationnels sont un ballet qui doit être exécuté de façon millimétrée : un rendez-vous raté et Mercure ne sera plus à la « bonne place » à l'orbite suivante, ce qui va impliquer d'autres besoins avec les moteurs, etc. BepiColombo a déjà survolé Mercure trois fois, il en reste deux en septembre et décembre 2024, puis un dernier survol en janvier 2025. Un délicat billard orbital que BepiColombo ne doit pas échouer, sous peine de devoir à minima repousser sa mise en orbite après décembre 2025 ou pire, de remettre en cause toute la mission six ans après son départ de Guyane.

Lors de ses survols de Mercure, les caméras de navigation sont mises à contribution pour de belles photos ! © ESA/JAXA
Lors de ses survols de Mercure, les caméras de navigation sont mises à contribution pour de belles photos ! © ESA/JAXA

Aussitôt détecté, aussitôt réparé ?

Heureusement, les nouvelles sont pour l'instant plutôt rassurantes. Moins de deux semaines après avoir découvert la panne, les équipes (qui ont immédiatement mis en place des groupes de travail pour comprendre le souci d'alimentation) ont réussi à rétablir le niveau de puissance, et donc de poussée des moteurs à 90 %. Ce qui est provisoirement suffisant pour assurer la manœuvre en vue de l'assistance gravitationnelle prévue en septembre prochain. Mais la situation est inconfortable, il convient de comprendre au maximum ce qui a pu se passer pour ne pas souffrir du même problème dans les mois à venir, tout en assurant qu'aucune autre panne ne va dégrader l'action des moteurs. L'ESA, qui a communiqué ce 15 mai sur le problème, a dégagé du « temps d'écoute » sur son réseau de grandes antennes pour plus d'échanges avec BepiColombo. Il faut souhaiter que ce ne soit qu'une alerte sérieuse : après tout ce trajet et à 18 mois du but, les 2 sondes et leurs instruments sont dans un état remarquable.

Source : esa