La présence de logiciels préinstallés sur un ordinateur neuf est-elle assimilable à de la vente liée, une pratique pénalement condamnable en France au regard de l'article L122-1 du Code de la consommation ? La question n'a encore jamais été catégoriquement tranchée, mais le tribunal de proximité de Puteaux a condamné dans un jugement rendu le 23 juillet la firme Acer à rembourser à l'un de ses clients la valeur correspondant à l'ensemble des logiciels installés sur son ordinateur neuf. La valeur de cet ensemble de logiciels a été estimée à 311,85 euros, soit plus de la moitié du prix de vente de cette machine achetée 599 euros (un portable Aspire 3613 WLMi 80). La procédure aura duré plus d'un an.
Ce montant de 311,85 euros correspond donc aux différents logiciels préinstallés sur la machine, à commencer par Windows XP Home qui compte pour 135,20 euros, auxquels s'ajoutent 49,90 euros pour l'installation. Viennent ensuite Microsoft Works (60 euros), PowerDVD (40,99 euros), Norton Antivirus (38,66 euros) et NTI CD Maker (37 euros). A cette condamnation, le tribunal a ajouté 500 euros à titre de dommages et intérêts et 150 euros de frais de justice.
D'après le jugement rendu par le tribunal de Puteaux, publié par le plaignant (format PDF), ce dernier a démontré qu'il n'avait jamais accepté les conditions d'utilisation des logiciels installés sur sa machine. Or le contrat de Windows XP prévoit que l'utilisateur demande le remboursement de son système s'il ne souhaite pas les accepter. En revanche, le plaignant n'a pas cherché à faire jouer le délai légal de rétractation de sept jours dont il disposait après avoir commandé sa machine en ligne.
Tentant d'obtenir le remboursement de ces logiciels dont il ne voulait pas auprès d'Acer, il se serait vu proposer a somme de trente euros, correspondant à l'unique système d'exploitation Windows XP Home. Pour obtenir cette somme, correspondant au prix d'achat de la licence XP OEM par Acer, il est cependant nécessaire de ne pas avoir utilisé le système et de retourner la machine au siège d'Acer. La nature contraignante de cette procédure a manifestement été remarquée par le tribunal.
Contactée par nos soins, la direction France d'Acer n'a pour le moment pas souhaité commenter cette décision. Une communication officielle visant à expliciter son point de vue pourrait cependant intervenir dans les prochains jours.
Farouches détracteurs de la vente liée dans le domaine informatique, l'April (Association pour la promotion
et la recherche en informatique libre) et le groupe Détaxe se félicitent de ce jugement. « Le gouvernement français doit maintenant faire appliquer le code de la consommation pour que le consommateur soit informé du prix qu'il paye pour les logiciels, dont le système d'exploitation Microsoft Windows, et puisse choisir lorsqu'il achète un ordinateur », écrit ainsi Frédéric Couchet, délégué général de l'April.
Cette décision devrait par ailleurs apporter de l'eau au moulin de l'association UFC Que Choisir, laquelle a lancé en décembre dernier une procédure judiciaire à l'encontre des groupes , Auchan et Darty au sujet de la vente liée.