Un Yoga entièrement tactile
Le concept du Yoga, on le connaît, et il a fait de multiples émules depuis, chez Asus comme chez HP. Soit un PC portable dont la charnière s'ouvre à 360° permettant de l'utiliser dans de multiples positions.En usage classique de portable, sur les genoux, en mode « tente » pour visionner une vidéo, à l'envers pour utiliser la partie clavier comme un support, à plat, ou encore plié en deux pour se concentrer sur l'usage tablette, le Yoga Book se contorsionne, qui plus est avec l'avantage d'une taille nettement réduite par rapport aux Yoga de 13 pouces.
Le Yoga Book reprend la formule, mais la partie basse intègre une surface tactile en lieu et place du clavier. Celle-ci affiche les contours, rétro-éclairés au besoin, de touches virtuelles et d'un trackpad. Et là on se dit : « Pourquoi ? »
Un stylet... ou un stylo !
Tout simplement parce qu'un second mode permet d'utiliser cette surface comme tablette graphique puisqu'elle intègre également une couche de reconnaissance d'un stylet fourni. Et ça n'est pas tout puisque ce dernier dispose de mines interchangeables et notamment d'une vraie mine de stylo bille.Le Yoga Book, à l'image d'une Bamboo Spark, permet d'écrire sur du papier tout en gardant une trace à l'écran. Lenovo fournit d'ailleurs un bloc-notes aimanté et spécialement adapté.
Le Yoga Book est relativement bien fini mais certains points sont un peu perturbants, notamment la partie basse qui n'est pas plate : la tablette n'est pas complètement stable. La charnière caractéristique des Yoga est toujours là, et si son esthétique divise, on continue d'apprécier sa précision et sa robustesse.
L'ensemble pèse son petit poids à une main, sans être inconfortable. Disons qu'en étant habitué à une tablette ultra légère à clavier amovible comme la Sony Xperia Z4 Tablet, on a un peu l'impression de trainer un petit boulet dont on aimerait parfois se séparer.
Bon point en revanche pour la jolie housse fournie : elle permet de stocker le Yoga Book et éventuellement le bloc-notes et le stylet. Au final, l'encombrement est tout de même réduit, et c'est appréciable !
Interface : un Android hybride
Le Yoga Book est disponible en deux versions : Windows ou Android. C'est la seconde version que nous avons eu à disposition et évacuons d'emblée une déception : on est sur Marshmallow, et pas Nougat. Or, Android 7.0 apporte des améliorations importantes côté tablette comme la possibilité, enfin, d'utiliser deux apps côte à côte avec une API gérée par Google et non un tiers comme Samsung.La mise à jour est néanmoins prévue, et en attendant, Lenovo a appliqué ses propres modifications. Pas de « split view » mais une possibilité tout aussi intéressante de basculer certaines apps en mode fenêtre, de la largeur de l'app en mode portrait sur un smartphone. Utile notamment pour épingler une fenêtre par dessus son app plein écran pour l'avoir en permanence à portée de main.
Le Yoga Book en pratique
L'usage de ce clavier tactile déporté nous inquiétait sur son efficacité. En pratique, si on est un peu rassuré sur le taux d'erreurs occasionné par son utilisation, on continue à chercher l'apport réel, repensant à la Touch Cover des premières Microsoft Surface.Et encore, sur la Touch Cover, les « touches » étaient légèrement saillantes. Il y a bien un retour haptique mais ne vous affolez pas : il s'agit d'une simple vibration, d'ailleurs pas des plus agréables.
Le trackpad est aussi bien géré que le permet Android, c'est-à-dire de manière assez basique. Disons qu'on apprécie davantage sa présence par réflexe d'utiliser un touchpad lorsque le Yoga Book est en mode « portable ». Il n'est même pas possible d'invoquer des gestes pour zoomer ou naviguer dans une page.
On apprécie en revanche la désactivation pertinente du clavier : dès que l'écran est en mode portrait, ou dès que le Yoga Book est plié en mode tablette ou « tente », un clavier virtuel prend le relai.
Evidemment, toute la spécificité du Yoga Book réside dans son stylet/stylo. En pratique, c'est un usage assez bien implémenté, mais qu'en est-il de sa plus-value réelle pour l'utilisateur ? Commençons par les bons points. Là encore, Lenovo gère la chose avec simplicité. Un bouton tactile de la surface permet de passer du mode clavier au mode tablette graphique. Le clavier s'éteint, et on peut dessiner exactement comme on le ferait avec une tablette Wacom, dont la technologie gère d'ailleurs la chose.
Le stylet est réactif, reconnaît de multiples niveaux de pression, et si sa finition n'est pas celle d'un Surface Pen, il semble assez robuste et a l'avantage d'être passif, donc de ne pas nécessiter de recharge (je te regarde, Apple Pencil). On apprécie également l'exécution automatique de l'app Note Saver dès que l'on active le stylet : ça permet de prendre instantanément des notes.
Et c'est là tout l'intérêt de la chose : le stylet, comme on l'a vu, peut être équipé d'une mine de stylo bille, tandis que le bloc-notes fourni vient s'aimanter sur la surface tactile. On se retrouve ainsi avec une solution d'esquisse ou de prise de notes manuscrite doublée d'une retranscription numérique immédiate.
La pression est tout aussi bien gérée qu'en dessinant directement sur la tablette, et si le bloc-notes est pensé pour s'adapter parfaitement au format du Yoga Book, il est évidemment possible d'utiliser n'importe quel papier par dessus la surface pour gribouiller ses idées.
En fait, le vrai bémol de cette solution réside dans l'absence de prise en charge du stylet sur l'écran principal. Il y a des moments où on voudrait dessiner directement sur l'écran. Et on peut, grâce à une fonctionnalité accessible depuis les paramètres, mais sans détection de la pression et avec une latence beaucoup plus perceptible.
En revanche, pour les habitués des tablettes Wacom, il est possible d'utiliser le stylet comme un dispositif de pointage et de contrôler toute l'interface du système.
Performances et autonomie
Quel que soit l'OS, le Yoga Book fait le pari d'un processeur Intel Atom, avec des résultats plutôt convaincants vu le segment visé. On a vu de meilleures performances sur une tablette, et on ne peut pas dire que l'appareil fasse des prouesses en matière de 3D notamment, mais l'ensemble est suffisamment fluide et réactif pour l'usage principal qu'on pourra en avoir, c'est-à-dire le surf, la bureautique, la lecture vidéo et le dessin.Côté autonomie, on est dans la moyenne d'une bonne tablette, à savoir aisément une dizaine d'heures d'usage peu intensif, et entre 7 et 8 heures sur des tâches plus lourdes. On a pu noter une bonne tenue de la batterie lors des phases de veille, et on peut espérer tenir plusieurs jours sans recharge dans le cas d'un usage beaucoup plus occasionnel.
Notre avis
Le Yoga Book est un produit déroutant et fascinant à la fois. Lenovo n'en est pas à son coup d'essai en la matière, mais cette nouvelle variante du concept Yoga a de quoi laisser perplexe : qui a vraiment besoin d'une tablette doublée d'un clavier, même pas physique, faisant lui-même office de tablette graphique ? N'est-ce pas justement sur l'écran que l'on a envie de dessiner directement ? Et pourquoi s'embarrasser d'une deuxième moitié d'ordinateur portable si ce n'est pas pour bénéficier de vraies touches ?Pourtant, on ne peut s'empêcher d'avoir envie d'aimer ce produit original qui témoigne au moins d'une volonté d'innover sur ce que peut être la partie basse d'un ordinateur portable, et de bouger les frontières entre tactile et dispositifs de pointage traditionnels. C'est dans l'air du temps, entre la Touch Bar des derniers MacBook Pro et le Surface Studio et son écran capable de se transformer en table à dessiner.
Et finalement, au delà du produit lui-même, éminemment sympathique mais encore très imparfait, c'est le potentiel du Yoga Book qui est intéressant. Pourquoi cette surface ne se transformerait pas en un écran OLED dont les touches pourraient changer de forme et de fonctions ? Où l'on pourrait dessiner directement sur n'importe quel des deux écrans selon ses envies ? En attendant, Lenovo signe un appareil dont on a un peu de mal à savoir à qui il s'adresse vraiment actuellement, tout en donnant envie de l'adopter, d'autant plus que son prix n'est pas délirant. Le signe d'une bonne idée qui gagnerait à être creusée dans des versions futures.