« Mais pourquoi tant de cachoteries », se demande la rédaction de Libération, dans un billet annonçant l'investissement « masqué » de Patrick Drahi, propriétaire de Numericable, dans leur quotidien. L'information, éventée fin avril, a été confirmée par Mediapart.
L'homme d'affaires franco-israélien, vainqueur sur Bouygues dans le rachat de SFR, a versé 4 millions d'euros sous forme de prêt au journal. Un montant réalisé en façade par Bruno Ledoux, actionnaire majoritaire de Libération, et engagé dans une recapitalisation de 18 millions d'euros. Le financement, réalisé via sa holding, contenait en fait une clause de substitution, réservée à Patrick Drahi.
« Dans les documents déposés au tribunal, les salariés avaient découvert la mention d'un investisseur anonyme appelé à participer à l'augmentation de capital », expliquent les salariés de « Libé » dans leur billet. Le 7 mai, Patrick Drahi affirmait au Monde « réfléchir » à la possibilité d'investir dans le journal. Deux semaines plus tôt, il confiait avoir été sollicité en ce sens.
Face à Xavier Niel
Mediapart écrit que « le patron de Numericable serait séduit par la marque Libération et soucieux de sauvegarder un acteur majeur du pluralisme de l'information à la française ». L'un de ses objectifs pourrait être de prendre place dans le quotidien avant Xavier Niel, actionnaire majoritaire de Free, son concurrent dans les télécoms, acquéreur du Monde en 2010 et se disant aussi intéressé par le dossier Libération.Ce n'est pas en fait le premier investissement dans les médias pour Patrick Drahi qui, en 2013, a créé la chaîne d'info en continu israélienne i24news et a mis la main sur les chaînes françaises Vivolta et Shorts TV.
Cet investissement de Patrick Drahi avait été partiellement démenti le 30 avril auprès des salariés de Libération par le PDG, François Moulias, qui concédait tout de même que l'homme d'affaires pouvait être un interlocuteur « naturel ». Du côté de la rédaction, les journalistes dénoncent le non-respect du principe de transparence dans le financement de la presse et une « dissimulation volontaire ».