L'intrapreneuriat, ce n'est pas de l'entrepreneuriat mal orthographié. Moins connu, il est pourtant une vraie façon de mener des projets et d'innover en entreprise. En 2016, le concept fête ses 40 ans ! Créé par l'Américain Ginford Pinchot, il est censé « permettre à la grande entreprise de mieux saisir les opportunités que son inertie naturelle laisserait passer sinon », explique le spécialiste Gilles Teneau, dans Le concept d'intrapreneuriat.
« L'intrapreneur est, précise le docteur en sciences de gestion, le membre d'une grande entreprise qui, en accord avec elle et tout en restant salarié de son entreprise, possède un projet viable intéressant l'entreprise et qu'il peut réaliser en son sein. Il est celui qui transforme une idée en activité rentable dans une organisation. » Vous ne connaissez peut-être pas Paul Buchheit, c'est pourtant ce développeur chez Google qui a créé Gmail.
Plusieurs avantages
Pour Véronique Bouchard, professeure en stratégie et intrapreneuriat à l'EM Lyon, un petit groupe d'intrapreneurs dans une société peut être « mieux placé » que l'entreprise dans certains cas, car :- il peut mobiliser les personnes ad hoc en interne et en externe et les ressources requises ;
- il est mieux à même de détecter les opportunités d'affaires dans son environnement immédiat ;
- il peut prendre des raccourcis pour faire évoluer rapidement le projet et tenir les délais ;
- il fait preuve de ténacité pour surmonter les obstacles et s'engager sans compter.
Mais avant de créer la petite équipe créative et dynamique qui fera le produit ou le service capable de booster l'activité de l'entreprise, plusieurs critères doivent être réunis. Il faut aussi préciser que la démarche ne viendra pas forcément de l'entreprise elle-même. Il est d'ailleurs plus probable que ce soit une initiative individuelle...
Initiative personnelle
Pour cela, mettez le pied à l'étrier. « N'attendez pas les autres pour démarrer de nouveaux projets, ou votre patron pour vous en confier. Si vous avez des idées, prenez les devants et développez-les vous-même en parallèle de votre activité au sein de l'entreprise », conseille le think thank belge spécialisé en intrapreneuriat, StartupShelter. Une fois le projet validé, vous devrez fédérer une équipe. Sinon, le projet risque d'achopper.L'intrapreneuriat est souvent porté par un salarié, qui doit être assez expérimenté, et devra s'armer de persévérance - Crédit : Fotolia.
Félicitations, vous êtes intrapreneur. Bien sûr, la réalité n'est pas si simple. Entre les collègues qui vous trouveront zélés, et vos managers qui se sentiront bousculés, vos velléités d'entreprendre dans l'entreprise risquent de ne pas passer inaperçu - surtout si vos missions actuelles sont affectées par vos nouvelles ambitions... Bref avant le grand saut, il faudra avoir préparé le terrain avec les personnes concernées.
Prise de responsabilités
À la différence d'une start-up, l'intrapreneuriat offre plus de sécurité. Mais beaucoup de responsabilités. Le produit/service devra être viable économiquement, et apporter de la valeur ajoutée à l'entreprise - aucune ne vous détachera à une mission d'accomplissement personnel, décorrélée la réalité des affaires. Vous serez donc d'autant plus jugés sur votre projet que vous l'aurez incarné. Vous devrez donc avoir bien jaugé votre audace.Contrairement au manager, imbriqué dans la chaîne de décision et la gestion de projet, l'intrapreneur se démarque par « un mouvement de recul », souligne Gilles Teneau, « afin de se rendre plus autonome » et « d'augmenter son degré d'initiative ». Ce profil est aussi tenu « à l'invention de nouvelles combinaisons de ressources et à l'avènement d'une rupture ». Certains s'émanciper même, afin de monter leur structure.
Accompagnement sur-mesure
L'idée développée peut avoir un tel potentiel que son porteur veuille en profiter pleinement. À l'inverse, un mauvais encadrement de l'entreprise peut compromettre le projet. Si de plus en plus de groupes se mettent à l'« open innovation » en attirant des start-up dans leurs filets, « l'environnement dans lequel se développe l'intrapreneuriat reste assez différent », nuance Inès Gaisset d'IBM. « Il n'y aura jamais la même agilité. »Conscient de cet enjeu, l'accélérateur de start-up Numa s'est associé à Attoma - un spécialiste de la stratégie d'innovation - pour lancer, d'octobre 2016 à janvier 2017, un programme d'accompagnement d'entreprises voulant « accélérer des projets internes en mode start-up ». Les organisateurs promettent, par exemple, de « reprendre les méthodes qui font le succès des start-up en devenant plus agile et rapide ». Y a plus qu'à.