iPhone : peut-on le produire aux États-Unis ?

Thomas Pontiroli
Publié le 13 juin 2016 à 13h39
Bien que républicain, et donc en principe pro-mondialisation et délocalisation, Donald Trump veut relocaliser la production d'Apple aux États-Unis. Le MIT s'est penché sur les conséquences.

Rapatrier la production d'Apple aux États-Unis ? Donald Trump, candidat républicain à la présidence des États-Unis, l'envisage. « Nous allons contraindre Apple à fabriquer ses fichus ordinateurs aux États-Unis, et pas dans d'autres pays », menaçait-il en janvier. La revue MIT Technology Review l'a pris au mot, et a imaginé ce qu'il en coûterait à la firme américaine de fabriquer ses iPhone non plus en Chine, chez Foxconn, mais aux États-Unis.

La déclaration de Trump portait sur les ordinateurs, et pas sur les smartphones, mais l'exercice reste intéressant.


Sur le coût d'un iPhone, on sait par le cabinet IHS que ses composants bruts reviennent à 230 dollars, dans le cas d'un 6s, et 156 dollars pour le SE. La revue rappelle que le terminal d'Apple est assemblé dans sept usines - six en Chine et une au Brésil. Globalement, le coût de l'assemblage est estimé à 4 dollars par appareil par IHS, et 10 dollars par Jason Dedrick, de la Syracuse University. Aux États-Unis ? Ce coût monterait entre 30 et 40 dollars.

346 fournisseurs chinois

On pourrait d'abord croire que cette inflation est due au coût du travail, forcément plus élevé. En réalité, c'est surtout lié aux nouvelles dépenses logistiques engendrées par cette relocalisation de la production. Apple a en effet des fournisseurs dans 28 pays, dont 346 en Chine, 128 au Japon, 41 à Taïwan - sans oublier la Corée du Sud - mais seulement 69 aux États-Unis. Les usines géantes Foxconn sont donc des arbres qui cachent une forêt.


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Implantation des fournisseurs d'Apple - Crédit : MIT.


C'est encore plus compliqué si l'on descend d'une strate. Qualcomm, qui fournit le modem LTE de l'iPhone SE, est bien une entreprise américaine, mais dont les puces sont fabriquées par GlobalFoundries... dans d'autres pays tels que l'Allemagne ou Singapour. Pour cela, il faut des usines à plusieurs milliards de dollars, ce qui rend le coût de la main d'œuvre anecdotique dans la production globale, estime l'ingénieur du MIT Duane Boning.

Mais la question est-elle de fabriquer chaque composant de l'iPhone sur le sol américain ? Ce scénario est peu probable, pour des raisons de compétence. En matière d'écran par exemple, Apple n'y peut rien si LG, Samsung ou Sharp ne sont pas américains. Et il aura bien du mal à trouver un équivalent dans son pays. Interrogé sur la localisation de la production par Barack Obama, Steve Jobs avait déjà brandi les compétences plus que les coûts.

Quid des terres rares

Quoiqu'il en soit, les chercheurs au MIT ont tout de même imaginé ce scénario, qui ajouterait 30 à 40 dollars supplémentaires au coût de chaque iPhone. Les composants, c'est une chose, mais les matières premières qui les sous-tendent, c'en est encore une autre. Un iPhone demanderait 75 matériaux différents, comme la bauxite, qui n'est pas extraite du sol américain, mais qui est pourtant nécessaire pour obtenir l'aluminium si cher à Apple.


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Matériaux contenus dans l'iPhone - Crédit : MIT.


Pour ce qui est des terres rares, on en trouverait 85 % de la production mondiale en Chine. Vu de loin, on ne cerne pas forcément leur utilité. Si l'on prend le néodyme, comme l'illustre le MIT, il est par exemple utilisé dans le vibreur du téléphone, le micro, ou les hauts parleurs. Le lanthane, lui, est nécessaire à la caméra. En tenant compte des fournisseurs et des matériaux, la production en Chine est, de ce point de vue, assez logique.


En additionnant tout, le MIT estime le surcoût unitaire à 100 dollars. Quand on sait que la marge d'Apple est d'environ 40 %, et que l'écart entre le prix de vente d'un iPhone 6s et le prix de ses composants est de plus de 500 dollars, on se dit que l'entreprise pourrait très bien absorber ces 100 dollars. Sans compter que le scénario le plus extrême a été envisagé par le MIT. Si l'on ne rapatriait que la production, le surcoût ne serait pas si élevé.

Entre les robots et Trump

Il y a aussi l'emploi. Foxconn est le plus grand employeur du monde, avec 1,2 million de salariés. Cette masse salariale fluctue selon les besoins de la production, et permet à des dizaines de milliers de personnes, souvent issues des campagnes, de travailler. Mais là encore, la réalité est plus complexe. Fin mai, Foxconn a annoncé le remplacement de la moitié du personnel de l'une de ses usines par 60 000 robots. À terme, il vise le million...

Lorsqu'on s'interroge enfin sur la sortie de Donald Trump sur Apple, comme l'a fait Business Insider, on se demande si elle est totalement étrangère aux 150 000 dollars que Samsung lui a versés pour un discours.


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