La cour d'Appel de Paris a tranché : Google n'a pas abusé de sa position dominante dans l'univers de la recherche en ligne pour évincer ses concurrents potentiels sur le marché de la cartographie en ligne. Le moteur de recherche a finalement obtenu gain de cause, deux ans après sa condamnation en première instance. La cour a choisi de se ranger aux conclusions de l'avis édicté fin 2014 par l'Autorité de la concurrence.
Le verdict sonne comme une déception pour le plaignant, le français Bottin Carto - devenu Evermaps en début d'année, qui commercialise depuis plus de vingt ans des fonds de carte et une offre de services associés à destination des entreprises. En 2009, la société décide d'attaquer Google en justice, au motif que le moteur de recherche fournit un accès gratuit aux interfaces de programmation (API) liées à son propre service de cartographie, Maps.
Dans sa procédure initiale, Bottin ne dénonce pas directement la gratuité du service, mais fait valoir que Google puise dans les recettes générées par son moteur de recherche pour en assurer les frais de fonctionnement. La pratique induirait une distorsion de concurrence vis-à-vis des acteurs spécialisés, qui n'ont d'autres recours que la vente pour financer leurs propres services.
Condamné en 2012, Google porte l'affaire en appel. La Cour en appelle un an plus tard à l'Autorité de la concurrence, avançant entre autres motifs qu'elle ne dispose pas des documents permettant d'établir les coûts réels de fonctionnement de la version Google Maps proposée aux entreprises.
Fin 2014, l'Autorité rend public son avis, dans lequel elle indique ne pas être en mesure de qualifier un abus de position dominante ou une pratique de prix prédateurs. Un an plus tard, la cour d'Appel suit cet avis sur le fond (pdf), et casse le verdict initial, condamnant dans le même temps Bottin aux dépens.
« Nous considérons que la gratuité sans contrepartie publicitaire constitue une position prédatrice, puisque Google finance cette activité grâce à d'autres marchés. La gratuité est souvent une phase transitoire : une fois que la concurrence a été asséchée, rien n'empêche de migrer gentiment vers un modèle payant qui échappe à la régulation du marché », alerte Dorothée Mani, directrice générale adjointe d'Evermaps.
« Les standards de preuve qui permettent de prouver des prix prédateurs sont assez complexes, alors que la pratique se révèle assez évidente d'un point de vue business », regrette-t-elle encore avant d'inviter à considérer l'évolution des spécialistes de la cartographie sur le marché français.
Sans écarter la possibilité d'un recours en cassation, voire au niveau européen, l'ex Bottin Carto devenu Evermaps se félicite aujourd'hui d'avoir entamé sa mue sans attendre, avec l'ambition affichée de passer d'un éditeur de cartes à une agence de services B2B autour de la cartographie.