Le marché s'intéresse désormais davantage aux habitudes des consommateurs afin de leur proposer des contenus à priori plus proches de leurs besoins. Sommes-nous sur une tendance lourde ?
JP Rangaswami : Le slogan de Salesforce est la promotion de « l'Internet des consommateurs », il est donc clair que nous prenons en considération de nombreux paramètres comme l'opinion des clients, leurs recommandations ou leurs interactions sociales. L'important est ainsi de tenir compte des aspirations de personnes regroupées dans une communauté. L'information partagée en elle-même ne fait donc pas tout mais pouvoir identifier des « villages de clients » permet de générer de la valeur.
Ajoutez à cet élément le fait que les canaux de communications (Internet fixe et mobile, le SMS, la voix...) coûtent désormais moins cher, nous avons-là plusieurs indicateurs qui nous permettent de penser que cette direction est pertinente.
Pour faire un tri dans cet amas d'informations, vous avez recours à des solutions de gestion des données mais également d'analyse de ces dernières. Mais est-il réellement possible d'analyser les sentiments des utilisateurs ?
Je ne commenterais pas les propos de la concurrence mais jusqu'à présent l'analyse des informations s'est basée sur des éléments sémantiques. Désormais, les données sont davantage dynamiques et plus hétérogènes, le fait non pas de corréler des indicateurs entre eux mais de connaître le lien de causalité les unissant est important.
Il faut donc aller plus loin que la simple métadonnée. Prenons un exemple, un emoticon peut être un moyen de connaître l'humeur d'une personne mais il ne donne qu'une très faible indication, finalement peu utile à celui qui désire cibler une clientèle en particulier. Par contre, savoir qu'un utilisateur est mobile, qu'il intervient régulièrement sur les réseaux sociaux est un facteur clé.
Face à cet arsenal, il peut être logique pour un consommateur de se méfier et de ne pas faire confiance à ce type de service. Ressentez-vous un déficit de confiance ?
Si vous prenez l'exemple des cookies sur les navigateurs Web, les internautes ne se plaignent pas de leur existence mais de ce qu'ils peuvent être en mesure de faire. En résumé, les gens n'aiment pas quand un produit ou un service fait autre chose que ce pourquoi il est proposé. L'important est donc de ne pas apporter d'asymétrie entre d'un côté les besoins d'un client et de l'autre une solution permettant de cibler les attentes des consommateurs.
Dans ce sens, en matière de marketing, il faut donc bien comprendre que si un client souhaite bénéficier d'outils ciblés, pour des offres, des informations ou des services supplémentaires, il devra consentir à livrer des données le concernant.
Finalement, on peut faire une analogie entre vos propos et certains tenants de la sécurité estimant qu'il faut devoir livrer certaines données afin de bénéficier de la sûreté ?
C'est un peu cela. Appliqué aux sujets qui nous intéressent, je suis personnellement tout à fait disposé à ce qu'un magasin me conseille le meilleur dentifrice en fonction de mes besoins, de mes habitudes ou d'autres paramètres. Il y a tellement de choix qu'il faut que l'on permette de faire aisément un tri et que l'on m'apporte le bon produit.
Le pendant de cette position n'est-il pas que les entreprises telles que Salesforce ont une responsabilité envers les consommateurs ?
Ce que j'avance n'est tolérable qu'à condition d'être suffisamment transparent sur de nombreux points. Un service doit véritablement dire quelles données il utilise et à quelles fins. Ceci est même capital puisque cela cimente la relation avec le consommateur, elle permet d'obtenir un engagement de sa part. Une fois mis en confiance, il est davantage apte à partager de nombreuses informations. Ainsi, tant que cet élément est établi, la relation avec lui peut perdurer.