La commission consultative fait part de ses interrogations quant à la proposition de loi visant à lutter contre la haine sur Internet dans un avis public délivré jeudi.
Alors que la proposition de loi visant à combattre les propos haineux sur Internet a été enregistrée par l'Assemblée nationale le 6 mars dernier, le Conseil national du numérique (CNNum) a rendu un avis public, le jeudi 21 mars, dans lequel il s'inquiète des conséquences du texte sur les droits et libertés des individus. Même si l'organisme n'exerce qu'une activité de conseil, ses avis, rendus de manière indépendante, comptent aux yeux du gouvernement.
Des mesures ? Oui, mais dans le respect des droits et libertés
Tout en rappelant « son attachement à la lutte contre les contenus haineux », le Conseil national du numérique estime que le renforcement du droit en vigueur et les mesures tendant à responsabiliser davantage les plateformes doivent se faire « dans le respect des droits humains, des principes de nécessité et de proportionnalité » et doivent aussi « intégrer des recours effectifs » pour éviter d'éventuels abus.La proposition de loi portée par la députée LREM Laetitia Avia veut mettre fin à un manquement juridique en la matière. Outre une sanction pouvant aller jusqu'à 4 % du chiffre d'affaires annuel, elle pourrait exiger des réseaux sociaux de retirer tout contenu qui enfreint la loi dans un délai de 24 heures et renforcer les sanctions prononcées à la fois à l'encontre de la plateforme hébergeant le contenu et à l'encontre de l'auteur du contenu ou des propos.
Le CNNum milite pour une graduation des sanctions et un suivi des recours
Tout en insistant sur l'ambition salutaire des pouvoirs publics, le CNNum a identifié plusieurs enjeux dont ils doivent tenir compte. L'organisation invite notamment l'État à fournir des définitions claires s'agissant du caractère « manifestement » illicite d'une « incitation à la haine » ou d'une « injure. » Le Conseil national du numérique invite les pouvoirs publics à mettre en place un système de recours juste, afin que le manquement constaté puisse être sanctionné.Une graduation de la sanction et la veille à la conformité au droit européen sont aussi réclamées par le Conseil. Car la proposition de loi vient sanctionner lourdement toute inaction d'une plateforme et ne prévoit rien en cas d'excès de censure, « y compris pour des contenus légitimes ».
Une réglementation européenne, plutôt que de multiples législations nationales
Le CNNum redoute également que la mise en œuvre de « moyens technologiques proportionnés et nécessaires à un traitement dans les meilleurs délais des signalements reçus » n'encourage le recours à un filtrage automatisé par l'IA qui renforcerait l'impact des géants du numérique, déjà colossal.De manière générale, le CNNum s'inquiète de la multiplication des législations nationales, au détriment d'une réglementation harmonieuse européenne qui renforcerait la collaboration entre les États ainsi que l'efficacité des solutions, dans le respect des libertés et droits fondamentaux. Un parallèle pourrait d'ailleurs être fait sur ce sujet avec la taxe Gafa.