Alors que le droit à indemnisation devenait de plus en plus difficile à mettre en œuvre, les passagers aériens pourraient bien brandir une nouvelle arme : le RGPD.
Jusqu'au 14 février 2018, se faire indemniser d'un retard important par votre compagnie aérienne s'avérait être relativement simple. Il suffisait en effet d'invoquer le règlement européen du 11 février 2004 régissant les conditions communes d'indemnisation des citoyens européens en cas d'importants retards de vol, d'annulation ou de refus d'embarquement. La règle voulait que le passager imputé ne présente qu'une preuve de son enregistrement sur le vol qui posait problème.
Se faire indemniser relève désormais du parcours du combattant
Mais ce fameux 14 février 2018, la Cour de cassation (plus haute juridiction de l'ordre judiciaire) a rendu un arrêt qui vient davantage renforcer les conditions d'indemnisation des passagers français, et ainsi restreindre la possibilité de parvenir à obtenir satisfaction. Les juges du quai de l'Horloge ont accordé le droit aux compagnies de s'exempter de tout remboursement dans les cas où le passager n'apporte pas de preuve réelle de sa présence à bord du vol, une carte d'embarquement pouvant se procurer de façon dématérialisée aujourd'hui...Pourtant, deux tribunaux d'instance, ceux de Martigues dans les Bouches-du-Rhône et de Villeurbanne dans la métropole lyonnaise, ont rendu 47 jugements entre octobre 2018 et février 2019, qui ont permis à des plaignants, passagers, d'être indemnisés sur la base d'un faisceau d'indices attestant leur présence à bord d'un appareil, comme le rapporte le journal Les Échos. Gwendoline Gautier, l'une des avocats d'AirHelp, à l'origine des recours, voulait « démontrer que la décision de la Cour de cassation est contestable et pleine de non-sens. »
Les tribunaux mettent la pression grâce au RGPD
En réalité, l'article 15 du Règlement général sur la protection des données (RGPD) pourrait tout changer dans la pratique actuelle d'indemnisation des passagers. Ses dispositions offrent le droit à tout citoyen de demander l'accès à ses données personnelles détenues par toute entreprise. Ainsi, le passager pourrait prouver sa présence à bord en faisant jouer ce droit. Mais certaines compagnies seraient réticentes à l'idée d'y céder.Pour maître Gautier, « le RGPD octroie des droits à chaque particulier et chaque entreprise doit les respecter. Utiliser une règle de droit pour la mise en œuvre d'une seconde n'est pas détourner la première. » La Cour de cassation semble donc être dans une impasse. Va-t-elle être contrainte de revoir sa position ? Cédera-t-elle à un revirement de jurisprudence ? Il est encore trop tôt pour le dire. Mais cette affaire prouve encore une fois l'utilité croissante du RGPD dans un monde connecté.