Interview : Ingenico veut assortir le paiement mobile de services

Thomas Pontiroli
Publié le 20 novembre 2013 à 13h18
Ingenico est l'un des leaders mondiaux des solutions de paiement, connu pour ses terminaux pour carte bancaire. Après plusieurs rachats dans le domaine des transactions en ligne et mobile, Jean-Marc Thienpont, vice-président du paiement mobile, nous explique sa stratégie lors du salon Cartes 2013.

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Bonjour Jean-Marc Thienpont. Pouvez-vous nous rappeler dans un premier temps ce que fait Ingenico ?

Ingenico a vu le jour en 1980, c'est un acteur majeur des solutions de paiement dans le monde, avec plus de 20 millions de terminaux en activité dans plus de 125 pays. Pour vous donner un ordre de grandeur de la croissance de notre activité, le chiffre d'affaires de la société est passé de 40 millions de dollars en 1995 à 400 millions de dollars dix ans plus tard et il devrait atteindre les 1,3 milliard de dollars à la fin 2013.

Quel est le sens de l'histoire pour Ingenico, alors que le paiement gagne toujours plus le mobile ?

Historiquement, Ingenico est issu du domaine matériel, avec ses terminaux de paiement. Lorsqu'on s'est demandé comment allait-on créer davantage de valeur pour nos actionnaires, nous avons identifié plusieurs opportunités, comme le fait de monter sur la chaîne de valeur en proposant une gamme complète aux marchands. Avec l'émergence de nouveaux canaux comme le online et le mobile, en plus des interactions avec le physique, la situation du marché s'est complexifiée.

Comme comme nous n'avions pas de savoir-faire sur tous ces domaines, nous avons procédé à des acquisitions. En 2009, nous avons mis la main sur l'allemand Easycash pour 300 millions d'euros, afin d'offrir des solutions autour des terminaux et de tirer parti de la croissance des transactions de paiement. En 2009 nous avons réalisé un investissement stratégique dans Roam Data pour proposer des lecteurs de carte sur mobile. Début 2013, nous avons racheté le belge Ogone, spécialiste des paiements en ligne, pour 360 millions d'euros.

Qu'est-ce que cela change pour vous de fournir des solutions de paiement mobile ?

Ces changements, notamment Roam, ont induit une rupture pour nous dans la psychologie du paiement. Même si nous continuons à faire du paiement dit « face-to-face » sur mobile, le fait d'ajouter un terminal externe dans l'équation change la donne. Avec l'environnement mobile associé au dongle, on bénéficie de l'environnement applicatif ce qui fournit de nombreuses possibilités de services pour nos clients.

Nous pouvons par exemple fournir une application de gestion des stocks, une autre dédiée à la gestion de la relation client, nous pouvons également cibler les clients et les prospects avec des campagnes de couponing, etc. Et les flux de revenus s'en trouvent changés par rapport au paiement traditionnel, car ces services mobiles permettent de générer des revenus supplémentaires et donc d'enrichir le modèle économique.

Sur ce marché, vous faites face à l'américain Square. En quoi êtes-vous meilleur ?

Square a décidé d'attaquer le segment des petits marchands qui n'avaient pas de terminal de paiement. Aux États-Unis, un dongle où il suffit de glisser sa carte dedans (« swipe & sign ») coûte bien moins cher qu'un terminal où il faut entrer un code pin (« chip & pin ») tel que c'est imposé en France par exemple. Dans le premier cas, cela coûte 20 dollars - d'où l'image de low-cost -, donc ils peuvent se permettre de l'offrir à leurs clients. Mais dans le deuxième cas, il coûte 100 euros et là leur modèle ne tient plus car il faut le vendre.

Ce système est nativement davantage sécurisé. Il bénéfice en outre d'un chiffrement au niveau de la communication Bluetooth mais aussi un encryptage de bout-en-bout. Au final, la solution Roam est assez équivalente à un terminal de paiement classique. Nous vendons cette solution en marque blanche, nous l'avons déployée dans huit pays en plus en un an, et 100 000 marchands américains l'on adopté, avec des transactions moyennes de 100 dollars. En France nous avons comme clients Orange et une grande banque.


Va-t-on vers une convergence des modes de paiements qui se feront tous en ligne ?

Il ne faut pas perdre d'esprit que la sécurisation des paiements en ligne et physique sont tout à fait différentes. En ligne, il faut intégrer par exemple un moteur de fraude dans le processus de paiement donc ce mode de transaction ne sera jamais équivalent au paiement physique sauf si tous les consommateurs étaient équipés d'un terminal de paiement par carte chez eux. Mais il existe une certaine convergence.

La multiplication des modes de paiement, répartis entre le physique, le mobile et le online induisent en fait une complémentarité. Je peux par exemple démarrer mon parcours d'achat en réalisant une transaction en ligne, que je vais poursuivre en boutique, et je finirai par me faire rembourser sur Internet.

Après avoir commencé à déployer vos solutions mobile et online, quel défi vous attend ?

L'année 2014 sera importante dans le domaine du mobile. Nous observons une forte montée en volume au Brésil. En Europe et en Asie, nous comptons beaucoup de pilotes en phase de test mais qui devront transformer l'essai l'année prochaine, ce sera le moment de vérité. Nous estimons pouvoir séduire 30 millions de clients à horizon 3-4 ans. Notre axe de travail principal s'axera autour de la convergence.

Un mouvement de fond est en train d'arriver pour les professionnels en matière de paiement sur mobile et tablette, le tout associé à des services. En accord avec notre plan stratégique 2016, notre objectif est de déployer commercialement nos nouvelles solutions puis de monétiser la base installée.
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