Critique Watchmen : Damon Lindelof reste Gardien du succès

Antoine Roche
Publié le 18 janvier 2020 à 16h00
Watchmen

Je l'attendais autant que je la redoutais et il a fallu que je la visionne entièrement pour que mon opinion soit véritablement claire : la saison 1 de Watchmen est finalement l'une des meilleures choses diffusées à la télévision en 2019.
Dans un contexte où l'offre en matière de séries n'a jamais été aussi pléthorique, le Veilleur d'écran[s] se propose d'être votre guide à travers les saisons. Qu'il s'agisse d'une ancienne série aujourd'hui culte, d'un carton récent ou d'un show plus anonyme, cette nouvelle chronique vous aidera à ne perdre votre temps qu'en bonne compagnie.

Accompagnez la lecture de cet article avec la musique de la série :


Damon in the rough

Damon Lindelof did it again. Après la culte Lost et la formidable The Leftovers, avec la saison 1 de Watchmen le créateur a encore marqué cette année d'une pierre blanche. Je ne sais sincèrement pas comment attaquer cette chronique tant le show est atypique à bien des égards, mais commençons peut-être par mettre les choses à plat pour celles et ceux qui ne seraient pas familiers du projet.


Watchmen c'est avant tout un comics à succès lancé en 1986, que l'on doit à Alan Moore. En 2009, une solide - et globalement saluée - adaptation au cinéma signée Zack Snyder voit le jour : Watchmen : Les Gardiens. Et dix ans plus tard, voici donc venir une autre « adaptation », en série cette fois, sur HBO. Vous noterez bien les guillemets, car d'après Lindelof lui-même, il s'agit plus d'un « remix » que d'une adaptation, d'une suite ou d'un reboot du comics.

En effet, si la série partage bien certains thèmes, notions et personnages avec l'oeuvre de Moore - et quelques références qui feront plaisir aux fans et passeront sans dommage au dessus de la tête des autres - elle a vocation à raconter des choses bien différentes du comics, et à être pleinement savourée, quel que soit votre niveau de connaissance de la licence. On retrouve donc un show qui n'a plus grand-chose à voir avec son inspiration originale, ce qui est, à mon humble avis, tant mieux car la redite pure n'aurait pas eu grand intérêt (sauf pour les puristes qui attendaient peut-être une adaptation plus classique, mais tant pis).


Durant neuf épisodes, et contrairement au comics ou au film donc, l'intrigue se déroule à notre époque. Cela dit, nous nous trouvons toujours dans une réalité alternative, dans laquelle l'apparition précoce de super-héros au cours des décennies précédentes a changé l'Histoire telle que nous la connaissons (et je vous laisserai découvrir par vous-même en quoi). Le cœur du scénario se déroule à Tulsa, Oklahoma, et suit notamment Angela Abar, incarnée par la royale Regina King.

The End is Night

Cette dernière est à la fois détective de police et justicière, sous le nom de Sister Night. Car oui, dans cette version de Watchmen, les policiers de Tulsa sont tous masqués, façon super-héros ou avec un foulard jaune plus sobre. La raison est simple : éviter que leur identité ne soit dévoilée et que des représailles ne puissent être menées contre eux ou leur famille. Selon la mythologie de la série, cette décision découle d'un événement survenu trois ans plus tôt, lorsqu'un groupe de suprémacistes blancs, la Seventh Kavalry, a massacré des dizaines de policiers chez eux durant la nuit de Noël.


Et me voilà de nouveau bien embêté, car je ne peux pas vous en dire beaucoup plus sur le scénario pour vous donner envie de regarder Watchmen. Cette rétention d'informations et de détails, que l'on retrouve d'ailleurs dès les trailers, constitue l'une des principales forces de la série, aussi il serait criminel de ma part de gâcher cela ! C'est cependant aussi l'un de ses rares points faibles, car les moins patients d'entre vous n'arriveront probablement pas à passer outre les premiers épisodes, où Lindelof fait... du Lindelof, soit le fait de ne pas aller dans une direction claire, et d'introduire beaucoup d'éléments étranges sans les expliquer immédiatement (voire sans les expliquer tout court).

« L'un des épisodes de Watchmen est LE meilleur épisode toutes séries confondues que j'ai pu voir en 2019 »


Néanmoins, contrairement à certaines de ses précédentes œuvres, Damon Lindelof finit ici par tout clarifier, et même à tout justifier avec finesse et brio dans les derniers épisodes. Tout se rejoint, supprimant ainsi les potentielles frustrations (en tout cas pour ma part, j'aime bien quand tout est expliqué et cohérent) et faisant exploser le cerveau plusieurs fois au passage. En parlant des derniers épisodes, je me permettrai juste de vous teaser un petit peu en déclarant que l'un d'entre eux est LE meilleur épisode toutes séries confondues que j'ai pu voir en 2019.


Outre ce scénario, qui va crescendo, pour lequel les adjectifs me manquent (riche, intriguant, surprenant, meta, what the fuck juste comme il faut, ou encore bien ficelé...) et qui se permet même d'être engagé sur bien des sujets (ah que c'est pénible de ne pas pouvoir en dire plus !), la forme, HBO oblige, vient sublimer le fond.

Par le casting, d'abord, car Regina King n'est pas la seule à briller. À ce titre, je tire notamment mon chapeau à Tim Blake Nelson et son formidable accent, à Jean Smart, ses répliques et ses mimiques exceptionnelles, ou encore au toujours impeccable Jeremy Irons.

Doomsday Claque

L'ambiance visuelle de la série ensuite, qui mélange avec sobriété et pertinence des spécificités de cet univers dystopique, dans un cadre qui nous est pourtant familier. Cet équilibre participe au fait que l'on croit à l'univers alternatif proposé, facilitant ainsi l'immersion et l'impact sur le spectateur. Enfin, et alors que je ne suis pas toujours fan de leurs travaux, la bande-son signée Trent Reznor et Atticus Ross (qui avaient déjà œuvré sur celle de The Social Network notamment) m'a cette fois régulièrement collé des gifles.


Pour toutes ces raisons, Watchmen est à la fois l'une des séries les plus originales, étonnantes et solides de l'année tout juste passée (Il y a quelques semaines, le final de la S01 de notre chronique reprenait les meilleurs shows de 2019 et Watchmen y figurait logiquement).

Notez enfin qu'on ne sait toujours pas si une saison 2 de Watchmen sera commandée par HBO. Si tel devait être le cas - et ça ne serait clairement pas indispensable tant la saison 1 est parfaitement calibrée, terminée et se suffit à elle-même - le retour de Lindelof aux commandes serait tout aussi incertain.

Cette série est pour vous si :

- Vous aimez Watchmen (en comics ou film) et/ou Lindelof
- Vous recherchez un récit surprenant et solide sur tous les plans
- Vous voulez une série courte

Cette série n'est pas pour vous si :

- Vous savez que vous n'aurez pas la patience de supporter les premiers épisodes volontairement nébuleux
- Vous êtes hermétique au style Lindelof
- Vous ne voulez plus de shows avec des super-héros (même si finalement ce n'est pas vraiment une série de super-héros)


La saison 1 de Watchmen est disponible du côté d'OCS.

Antoine Roche
Par Antoine Roche

Journaliste spé culture pop (séries/ciné/JV), technologie (SVoD, OS, apps…) et jeux de mots douteux. Pas forcément dans cet ordre.

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Commentaires (5)
Maga83

Il n’y aura pas de saison 2, Lindelof a déclaré sur Twitter que la saison 1 se suffisait à elle-même.

atahonfl

Tant mieux. Quelle purge, le veilleur et moi n’avons vraiment pas les mêmes goûts.

Marvaxx

Et à part des meufs qui discutent au tel et une autre qui nous regarde de haut il y a quelque chose d’interessant ?

Ma connaissance des Gardiens se limite au film de Snyder que j’ai absolument adoré (contrairement au reste de sa filmographie).

Ok, après lecture de l’article, je me laisse tenter.

ODYSSEY20002000

Quel génie. Quelle histoire. J’en suis encore retourné. A découvrir immédiatement.

philouze

il faut dépasser les premiers épisodes, c’est excellent, j’irais jusqu’à génial.
faites vous une raison avant (sinon vous serez frustré) : ce n’est PAS une série de super héros, c’est plus … politique.

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