Quelle mouche a bien pu piquer cet organisme de régulation ? Au Brésil, l'Anatel teste une méthode des plus radicales pour endiguer le phénomène IPTV et les flux pirates. Comment ? En accédant et en agissant directement sur les serveurs centraux !

© Shutterstock / D-VISIONS
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Les défenseurs de la neutralité du net risquent bien de déchanter. Si le Brésil s'engage sur cette voie, elle disposera d'un outil supplémentaire avec un mécanisme de blocage particulièrement invasif.

Une liste noire, accompagnée d'une liste blanche

Devant le phénomène de l'IPTV illégale et du piratage des flux protégés de streaming, le Brésil semble marcher main dans la main avec les titulaires de droits pour trouver des solutions pour endiguer le problème.

Alors que le pays dispose déjà d'un système de blocage lui ayant permis de mettre pas moins de 11 800 domaines sur liste noire, les autorités, dont l'Anatel (l'équivalent de l'ARCOM pour le Brésil) veulent s'assurer que seules les plateformes et les appareils autorisés peuvent diffuser des contenus !

Une méthode des plus radicales

Alors, comment faire pour parvenir à cette finalité ? Dans une récente intervention chez Tele.Síntese, Artur Coimbra, membre sortant du conseil d'administration d'Anatel, a tenu des propos étonnants qui laissent savoir qu'un dispositif de blocage sur les routeurs centraux est déjà en cours d'expérimentation. Expliquant que le Brésil doit se doter d'un système de blocage automatique, qui ne nécessite pas de décision judiciaire, il enchaine : « la seconde étape, que nous devons encore évaluer, car certaines entreprises le souhaitent, et d'autres sont plus hésitantes, est de permettre à Anatel d'accéder aux routeurs centraux pour passer un ordre direct sur le routeur ».

Pour le dire plus clairement, le Brésil compte s'engager sur la même voie que l'Italie et son Piracy Shield avec le blocage automatisé. Un système déjà décrié, d'abord en raison des erreurs commises, comme lorsque Google Drive a été bloqué il y a quelque temps, aussi car son efficacité serait loin des promesses initiales.

À cette première déclaration, Arthur Coimbra ajoute : « Les entreprises qui estiment cela commode peuvent nous donner un accès limité, pas un accès complet, pour que nous puissions effectuer ces blocages directement pour les équipements non certifiés et non approuvés. Un accès limité pour que nous puissions seulement effectuer ces blocages à distance ». Pour lui, cet accès « serait une sorte de sceau virtuel ».

Cela signifie qu'en plus des armes dont disposent déjà les autorités, l'Anatel souhaite accéder directement aux routeurs centraux pour bloquer les appareils non certifiés à distance, principalement des boitiers et autres sticks tournant sous Android TV qui sont illégaux au Brésil s'ils n'ont pas reçu une certification.

Les ayants droit en veulent plus !

Comme le rappelle Torrent Freak, les titulaires de droits en veulent toujours plus. Puisque les sites et services IPTV renaissent souvent de leurs cendres, ou encore que les utilisateurs parviennent à contourner les blocages géographiques grâce à un VPN ou un DNS alternatif, les autorités sont incitées à mettre en place des dispositifs plus efficaces par les ayants droit, comme c'est le cas avec le blocage automatique ou encore des mesures de blocages préventifs.

Le problème qui se pose néanmoins est l'usage et la supervision de tels outils pour lutter contre l'IPTV illicite. Le système actuellement en place a, par exemple, rendu possible, il y a peu, le blocage de X.com au Brésil. La preuve en est que lorsque des outils de blocage sont accessibles, ils sont utilisés pour d'autres fins que celles initialement prévues. Alors qu'en sera-t-il si l'autorité de régulation peut directement désactiver des appareils et des services en agissant sur les routeurs centraux ?