Frédéric Mitterand a donc expliqué qu'il allait « demander à l'Hadopi la manière de traquer le streaming illégal ». « Interdire les sites illégaux fait partie de l'arsenal éventuel » ajoute-t-il mais il précise qu'il ne « bougera pas » tant que l'Hadopi ne lui aura pas donné son expertise.
A propos du calendrier de ces mesures, il affirme : « Tout ce qui est illégal appelle des mesures assez urgentes. D'ici trois mois je sortirai un arsenal, plutôt une panoplie de mesures qui seront nécessaires ». La haute autorité réfléchira bien aux moyens de lutter contre le streaming illégal. De son côté, l'Hadopi a déjà défloré le sujet par le biais de ses Labs.
A ce titre, la haute autorité a pris le parti de délimiter un encadrement juridique pour le streaming. Dans un document, elle évoque le principe de la demande de retrait d'un contenu par les ayants-droit (Notice & Take down) comme étant une solution relativement simple mais dont les coûts s'avèrent importants.
Le filtrage généralisé est illégal selon la Cour de Justice de l'Union européenne
L'écueil principal auquel va devoir se confronter l'Hadopi sera de mettre en conformité les mesures de lutte contre le streaming avec la récente position de la CJUE dans l'affaire Scarlet/Sabam. Cette semaine, la Cour a estimé qu'il était contraire au droit le fait d'obliger un FAI à filtrer l'ensemble de son réseau sur le motif de la lutte contre le téléchargement illégal. Précisément, ce filtrage ne doit pas conduire à mettre en place un système de surveillance généralisée de son réseau.
L'une des hypothèses serait donc de dresser des listes noires de sites de streaming. Mais là encore, la position serait difficile à tenir puisqu'en bloquant totalement un site, tous ses contenus seront logiquement inaccessibles. Y compris les contenus légaux. Enfin, la présence de sites miroirs, ou l'utilisation d'outils comme un VPN pourraient mettre à terre cet arsenal. En attendant, l'Hadopi dispose de trois mois pour tenter de constituer un solide dossier sur le sujet.
Mise à jour : l'Hadopi réagit
L'Hadopi a réagi dans la journée aux propos du ministre de la Culture. Dans un communiqué, elle indique qu'en vertu de l'article L336-2 du Code de la Propriété Intellectuelle, le streaming « s'inscrit pleinement dans les missions de l'institution ». Sa présidente, Marie-François Marais ajoute que l'Hadopi mènera son action sur 2 volets :
- La réalisation d'une évaluation claire et précise des phénomènes visés, notamment dans leurs dimensions technique et économique, ainsi que des mesures de lutte juridiques et techniques existantes et de leurs limites.
- L'ouverture d'un dialogue intensif avec les sites et plateformes concernés ainsi que tous les intermédiaires qui contribuent à leur fonctionnement, dont notamment les établissements bancaires, intermédiaires de paiement ou de micro-paiement, et régies publicitaires, afin d'évaluer la situation et les moyens qu'ils pourraient mettre en œuvre pour y remédier.
Suite à ces réflexions, l'Hadopi promet que d'ici la fin du premier trimestre 2012, elle proposera des « adaptations de toute nature y compris législative afin de parvenir à mieux atteindre les objectifs fixés ».
A titre indicatif, les Etats-Unis discutent actuellement autour d'un texte visant également à lutter contre le téléchargement. Le SOPA (Stop Online Piracy Act) vise notamment à toucher au porte-feuille les plateformes proposant des contenus de manière illégale. Le texte propose que le détenteur d'un droit puisse demander à Google de bloquer l'ensemble des publicités (Google Ads) en cas de suspicion. De même, un compte Paypal pourrait être ainsi rendu inaccessible. Le second point évoqué par la haute autorité française semble aller dans ce sens.