La semaine dernière, des représentants de la filière du cinéma et de la vidéo ont assigné en justice les principaux FAI du pays mais également Google, Yahoo, et Microsoft en leur demandant de bloquer une grappe de sites baptisés AlloShare, AlloMovie et AlloShowTv.
Cette fois, on connaît les motivations de ces représentants puisque les motifs de l'assignation en justice ont été publiés par PcInpact. Précisément, elle s'attache à demander le blocage de ces plateformes selon plusieurs techniques : le blocage par DNS, par IP, l'extension aux sites miroirs, le déréférencement par les moteurs de recherche. Une stratégie en 4 bandes sur laquelle va devoir se pencher le tribunal de grande instance de Paris.
Le blocage technique du DNS, de l'adresse IP et des miroirs
Sur ce point, l'assignation (.pdf) est claire : « la mesure n'est donc efficace que si l'adresse DNS ou l'adresse IP bloquée conduit toujours aux contenus illicites ; dans le cas inverse ; les mesures de blocage devront être levées ; si le site n'est pas accessible via un autre nom de domaine et ou via une adresse IP tierce ».
Les 3 associations cherchent donc à mettre en place un système qui sera en mesure de bloquer l'accès aux sites en question. Cela signifie que le service visé sera non seulement inaccessible par son adresse en clair, mais il sera également bloqué si un internaute désire y accéder via une adresse IP.
Autre point crucial, l'assignation met clairement en joue la mise en place de « sites miroirs ». Pour rappel, un tel site est une copie qui propose exactement les mêmes contenus qu'un portail favorisant le téléchargement. L'intérêt d'une telle pratique est donc de contourner les mesures de filtrage par DNS demandées par les ayants droit puisque les contenus sont tout de même disponibles sur d'autres plateformes, à d'autres adresses...
Pour contrer ce phénomène, l'assignation précise que : « le traitement d'actualisation pourra déboucher, selon les cas, sur un nouveau blocage de nom de domaine ou encore d'une nouvelle adresse IP pointant vers une copie de ce même site, mais ne possédant pas de nom de domaine ». Un mécanisme d'actualisation sera donc mis sur pied. Un logiciel pourrait même devenir la clé de voûte du système.
Le logiciel combo ALPA/TMG
Là encore, le document est clair : « une fois qu'une adresse IP d'un site a fait l'objet d'une décision judiciaire de blocage, elle sera placée dans une base d'observation intégrée au dispositif logiciel d'actualisation aux fins de mise sous observation permanente. Dans ce cadre un certain nombre de paramètres font l'objet d'une vérification automatisée. Il s'agit notamment de vérifier si les paramètres clés de l'identité du site ont été modifiés et si l'adresse IP est éligible au blocage. [..] Pourront être sauvegardées de la sorte par le processus développé par l'ALPA avec TMG les exigences de preuve, de prévisibilité, de transparence nécessaires à l'obtention de l'autorisation du juge sans permettre aux sites illicites visés d'en profiter pour anticiper le traitement ».
Cela signifie donc que si un site se révèle être un miroir, il sera bloqué sans aucune autre forme de procès. Seul un agent assermenté sera chargé de faire appliquer la décision judiciaire initiale.
Enfin, la dernière demande des représentants du cinéma porte sur le déréférencement des sites bloqués. En ce sens, Google, Yahoo et Microsoft sont sommés de « prendre toutes les mesures nécessaires » afin que les plateformes visées n'apparaissent plus dans les résultats de recherche. Les ayants droits précisent que ce déréférencement devra s'appliquer au niveau mondial et donc ne pas se concentrer uniquement sur la France. Une manière de contourner l'usage d'outils comme les VPN par exemple (Virtual Private Network).
Et l'Hadopi ?
C'est la grande interrogation. Chargée de dégager des pistes afin de lutter contre le streaming illégal, elle doit rendre ses observations dans les semaines à venir. Pourtant, ce coup de filet à l'encontre des sites de téléchargement ne semble pas avoir été mis sur pied en collaboration avec la haute autorité.
Certains spécialistes s'interrogent donc sur le rôle de l'Hadopi. En premier lieu, Jean-Michel Planche conteste l'attitude des 3 associations : « Qui travaille en douce à un plan B, alors que le dispositif est en place et est promu jusqu'au plus haut niveau de l'état, Ministres et Président de la République compris ? Qui donc, ne croit pas que la société civile et les instances mises en place parviendront à un résultat ? ».
C'est désormais à la justice de se prononcer. Saisi en référé, le tribunal de grande instance a jusqu'au 15 décembre prochain, 9 heures pour rendre sa copie.