Taxis contre VTC : les raisons de la grogne

Ludwig Gallet
Publié le 27 août 2013 à 14h59
Les taxis voient d'un mauvais oeil le développement des services de voitures de tourisme avec chauffeur, qui misent désormais largement sur leurs applications mobiles pour développer leur activité. Les taxis les accusent de concurrence déloyale.

Depuis quelques mois, les chauffeurs de taxi sont en colère. Plusieurs manifestations nationales et autres opérations escargot liant la profession ont été organisées. La cause ? Les VTC, ou véhicules de tourisme avec chauffeur. Dépourvus du titre officiel de taxi, ils constitueraient selon eux une véritable concurrence déloyale, au sein d'une profession particulièrement réglementée.

Les VTC tendent fortement à se développer en France. Ils étaient un temps réservés à un marché de niche, relatif le plus souvent à une clientèle globalement fortunée. Le développement d'applications par ces acteurs leur a donné plus de visibilité. Elles permettent en effet de préparer son trajet de A à Z, avec des informations détaillées (trajet, prix, etc). Sur la liste des avantages avancés par les VTC: la maîtrise des coûts, puisque le tarif est estimé de façon précise avant la course, la propreté et le standing des voitures ou encore l'absence de tout règlement financier avec le chauffeur.

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Des possibilités que des acteurs comme SnapCar, Chauffeur Privé et autre Uber ont bien décidé d'exploiter. À tel point que ce dernier vient de lever 361 millions de dollars, dont la majorité - 257,8 millions de dollars- auprès de Google Ventures, le fonds d'investissement de la firme de Mountain View.

Chauffeurs de taxi et de VTC sont soumis à un régime distinct. Ils doivent tous les deux être détenteurs d'une carte d'aptitude et justifier de leurs compétences, même si le chauffeur de taxi doit suivre tous les cinq ans un stage de formation continue. La grande différence tient davantage dans l'interdiction faite aux VTC de prendre en charge « à la volée » des clients dans la rue. La commande préalable est obligatoire mais se trouve selon les taxis largement atténuée par la commande via les smartphones.

Les points d'achoppement

Pour les taxis, la situation est selon eux tout simplement déloyale. Ils mettent en avant toutes les contraintes pesant sur la profession. À commencer, bien sûr, par la fameuse licence indispensable au lancement de l'activité, particulièrement rare et onéreuse (de plusieurs dizaines de milliers d'euros à 250 000 euros pour les plus grandes villes).

Le débat est notamment parti de la loi de financement 2013 de la Sécurité sociale, présentée l'an dernier. À l'origine, le texte visait à introduire une procédure d'appel d'offre pour le transport des personnes malades, incluant donc potentiellement les fameux VTC. Jusqu'alors, cette activité était réservée aux ambulances, taxis conventionnés et autres véhicules sanitaires. Elle représente pour certains taxis de zones rurales un pan largement majoritaire de leur activité.

Finalement, en février dernier, le gouvernement a renoncé. La très forte mobilisation des taxis, partout en France, a donc fini par payer. Et l'exécutif ne s'est pas contenté de geler l'ouverture des appels d'offre puisque quatre mois plus tard, il instaurait également dans le projet de loi relatif à la consommation (ou projet de loi Hamon) un délai minimum de quinze minutes minimum à respecter par les VTC entre la commande et la prise en charge effective du client. Une hérésie pour les VTC, qui n'y voient qu'une volonté de freiner le développement de leur activité. Car l'une des grandes différences avec le métier de chauffeur de taxi tient dans l'interdiction pour eux d'aller solliciter directement les clients dans la rue ou devant les aéroports.

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L'appli SnapCar
Échanges musclés

Si les taxis se félicitent de la mesure, et estiment qu'elle replace le VTC dans son coeur de métier, ces derniers veulent à leur tour obtenir des aménagements. Ils disent craindre pour la survie de leur profession et demandent par exemple à ce que ce délai soit exclu dans le cadre des contrats signés préalablement avec des sociétés.

Ces dernières semaines, des échanges de courriers entre acteurs des VTC et représentants des chauffeurs de taxi sont venus faire resurgir la polémique. Dave Ashton, le fondateur de SnapCar, fut le premier à dégainer. Dans une lettre adressée au président du groupe taxi G7, relayée par Frenchweb, il condamnait la neutralisation de toute forme de concurrence « pour assurer le maintien du cours de la licence de taxi et poursuivre le chemin vers la pénurie ».

Il assure que les deux professions, si elles peuvent se retrouver concurrentes, sont compatibles. Principalement à cause du manque de taxis en France. Et de conclure: « acceptez la concurrence, laissez les VTC entrer dans la course avec vous. Laissez l'innovation technologique apporter du service aux Français. Laissez l'emploi se développer, il me semble que la France en a besoin. Laissez les Français se déplacer, comme ils en ont envie. S'ils veulent un VTC tout de suite, c'est leur droit de consommateur. Il y a de la place pour que votre activité et la nôtre se développe. »

La réponse est venue tout droit de la Fédération nationale des taxis, en date du 24 août dernier. Dans son courrier, Didier Hogrel, son président, estime que la concurrence des VTC est bel et bien déloyale au vu de la différence des coûts à engager au titre des équipements obligatoires. Les 15 minutes d'attente sont en son sens un minimum « pour permettre au véhicule de rejoindre le client qui vient de le contacter ».

Et de conclure : « Je ne puis donc que vous inviter si les contraintes et la législation française ne vous conviennent pas, à retourner en Californie ou vous tourner vers d'autres pays émergents afin d'installer et de déployer votre système organisationnel de transport de personne à la demande. »

Ludwig Gallet
Par Ludwig Gallet

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