Portrait : Netatmo veut réinventer les objets du quotidien

Thomas Pontiroli
Publié le 10 juillet 2013 à 14h18
En aluminium et connectée, la station météo Netatmo fait partie de ces objets reliés à Internet qui se multiplient. Parti en croisade contre les appareils du quotidiens laids et bons à réinventer, Fred Potter, le fondateur, a réussi à séduire des investisseurs dont l'ancien directeur d'Apple Europe.

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Fred Potter, le fondateur de Netatmo
Après avoir connecté les pages Internet entre elles puis les personnes au gré des différentes itérations du Web, 1.0 puis 2.0, nous voilà donc dans le Web 3.0, celui qui connecte les objets. Parmi les milliards d'appareils connectables, Fred Potter a choisi la station météo. Après être passé par le pèse-personne. Son leitmotiv : réinventer des produits existants en les reliant à Internet.

Qui est Fred Potter ? À la base, un ingénieur des télécoms. Formé à l'Institut des Sciences et Technologies ParisTech, il devient docteur en micro-électronique avant de rejoindre les rangs de Kaptech, « à une époque, souvenez-vous, avant les années 2000, où il y avait 180 opérateurs télécoms en France », raconte le futur entrepreneur, qui n'allait d'ailleurs pas tarder à se lancer dans le grand bain.

En 1998, il fonde Cirpack. Spécialisée dans les commutateurs pour la VoIP, la société finit par séduire des clients comme Free qui équipera toutes ses Freebox pour piloter sa partie téléphonique. Cirpack attire aussi IBM en 2002 pour équiper ses serveurs lames Bladecenter T. Douze ans passent et Fred Potter revend la société à Thompson. Et tourne la page.

Avec le pécule de tous les entrepreneurs qui cèdent une société qui a connu le succès, l'homme embraye sur une autre start-up en 2008. Pas encore Netatmo, mais on s'en approche. Il s'agit de Withings (lire notre test), un fabricant de pèse-personnes connectés à Internet, et reliés à une application de gestion du poids, de la masse graisseuse, etc. L'entrepreneur ne veut pas s'étendre sur la question.

Bougeotte intrinsèque ou meilleure opportunité ailleurs, il plie bagage en 2011 pour enchaîner sur un troisième projet, nous y sommes : Netatmo. Cette-fois donc, il connecte les stations météo. Y a-t-il un tel marché ici ? D'abord, cet appareil surfe sur la tendance de la e-santé, puisqu'elle propose de mesurer la qualité de l'air intérieur, en plus de la température et de l'humidité. Un secteur plutôt porteur.

En parallèle, on pourrait croire que Fred Potter a des comptes personnels à régler avec l'industrie des stations météo - ça n'est pas le cas. « Il y a un vrai besoin sur ce segment car l'offre actuelle est de très mauvaise qualité, les stations sont en plastique et ont souvent un écran dégoûtant », cingle Fred Potter qui estime que ce marché était mal adressé, et que lui peut réinventer ce genre d'objets du quotidien.

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La sienne des stations, avouons-le, a un certain cachet. Confectionnée en aluminium, elle se présente sous la forme d'un cylindre épuré rempli d'électronique et bien sûr d'un moyen de connexion Wi-Fi permettant d'exploiter l'application mobile, iOS ou Android. Un cahier des charges qui ne tardera pas d'ailleurs à séduire Apple qui intégrera le produit à son Apple Store au tout début de l'année 2013.

En fait il y a deux modules : l'un pour l'intérieur, l'autre pour l'extérieur. Les deux communiquent ensemble via onde radio. La station principale intègre pas moins de cinq capteurs : température, hygrométrie, pression atmosphérique, taux de CO2 et nuisances sonores. L'ensemble combiné de ces cinq facteurs va permettre à la Netatmo de restituer un indice de confort global sur une échelle de 100.

Depuis son application, l'utilisateur peut donc garder un œil par exemple sur la pression atmosphérique. Le taux de CO2 présent dans l'air ambiant est indiqué en particules par million (ppm). Car cette unité de mesure n'est pas forcément connue du quidam, et c'est bien normal, Netatmo vulgarise le tout via une pastille qui change de couleur : vert, jaune et orange. Dans le dernier cas, il faut penser à aérer.

Bien sûr, d'autres stations non connectées sont capables d'afficher la pression atmosphérique. Mais le but de Netatmo, c'est aussi de vendre un produit « hype ». Et d'entrevoir de nouveaux usages. Pour cela, la start-up a développé une API déjà utilisée par une centaine de développeurs. Preuve qu'il ne s'agirait pas juste d'un effet de mode, la société de Fred Potter a levé 4,5 millions d'euros en juin 2013.

Jusqu'à présent, la start-up fonctionnait sur un apport initial de 2 millions d'euros. « J'ai eu la chance d'y souscrire tout seul car j'avais revendu ma société », indique Fred Potter. Il reconnaît que « c'est un luxe sachant que beaucoup de boîtes peinent à se financer ». Quoique, quand on l'interroge sur le climat entrepreneurial en France, il se montre un peu plus mordant à l'égard de ceux qui « n'innovent pas ».

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Sa station n'indique pas ce climat-là, lui dit ne pas sortir beaucoup, mais son expérience de vingt ans dans le milieu a aiguisé son opinion. « La France est un endroit pour monter des start-up, on a de grands talents. Pour ce qui est de l'investissement, quand on a un bon projet, on trouve tout le fric qu'on veut. Qu'on ne s'étonne pas qu'en sortant la 192e application de location de taxi on ne lève pas », tance-t-il.

Netatmo a levé, elle. Auprès du FSN PME, gérée par la Caisse des Dépôts Entreprises, future entité de Bpifrance. Aussi auprès d'Iris Capital, le fonds d'Orange et de Publicis. Et enfin de Pascal Cagni, l'ancien directeur général d'Apple Europe, que Fred Potter a rencontré au salon LeWeb 2012 de Paris. Le retraité de la firme à la pomme était intervenu sur les objets connectés, promis à un bel avenir selon lui.

L'augmentation de capital de Netatmo, en attendant la prochaine, va rendre possible le développement de deux nouveaux produits. Ils seront présentés au prochain salon CES de Las Vegas début 2014, indique Fred Potter, sans en dévoiler plus, si ce n'est qu'il s'agira encore de confort intérieur. Probablement que ces deux nouveaux appareils connectés se situeront dans la même gamme de prix, plutôt premium.

Reconnaissons-le, la station Netatmo est chère : 169 euros. À cela, son créateur répond que « les gens ne veulent plus une accumulation de crottes en plastique, ils préfèrent se concentrer sur moins de produits, mais de meilleure qualité, et qui durent plus longtemps ». Combien de stations ont été vendues ? La société ne dit rien, mais indique qu'Apple a boosté ses ventes et qu'elle est à l'équilibre.

De poursuivre que « les Français ont tout de même un pouvoir d'achat ». De toute façon, Netatmo réalise 80% de son chiffre d'affaires à l'international, notamment en Europe. S'ajouteront bientôt à son tableau de chasse la Chine et le Japon. Un brin provocateur, Fred Potter trouve un avantage à avoir installé sa société « dans un pays pauvre : c'est plus simple pour exporter vers les pays riches ».

Thomas Pontiroli
Par Thomas Pontiroli

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