Depuis quelques jours, le monde entier parle de Pavel Durov, l'homme qui a fondé Telegram. Et s'il n'a que 39 ans, le jeune milliardaire a déjà derrière lui une vie bien mouvementée !
Mais qui est Pavel Durov ? Voilà bien une question que le public se pose depuis maintenant plusieurs jours et son arrestation à l'aéroport du Bourget, arrestation qui a eu un retentissement mondial. Si l'on est averti de son statut de fondateur de l'application Telegram, il faut aussi savoir que son parcours réussi dans le monde de la tech a commencé bien avant. Et que depuis, l'homme affiche un profil de milliardaire qui n'a rien à envier aux excentricités d'un Elon Musk !
Un jeune prodige à la Mark Zuckerberg
Pavel Durov, c'est d'abord et avant tout l'histoire d'un très bon étudiant. Au début des années 2000, il intègre ainsi l'université de Saint-Pétersbourg, où il se fait vite remarquer. Trois fois lauréat de la bourse Potanine, il multiplie les victoires durant diverses olympiades (design, informatique, linguistique). Mais surtout, le jeune Pavel crée durant ces années plusieurs sites internet tournant autour de la vie étudiante, à la même époque où Facebook commence à voir le jour aux États-Unis.
Et c'est justement la création de Mark Zuckerberg, dont un ami lui parle en 2006, qui va le mettre sur le chemin de sa première réussite : vKontakte. Une idée lumineuse. Car le réseau social, qui est une version russe de la plateforme de Meta, trouve très rapidement son public. Ainsi, dès 2008, soit à peine deux ans après la mise en ligne de l'interface, vKontakte comptait déjà près de 20 millions d'utilisateurs.
Des relations très compliquées avec le pouvoir russe
À 24 ans, Pavel Durov est ainsi déjà un homme important en Russie. De quoi le mettre rapidement en relation avec le pouvoir du Kremlin. Ou plus exactement, en confrontation. Déjà dans la vingtaine, Pavel Durov se présentait comme un libertarien qui ne souhaitait pas collaborer avec les autorités étatiques dans leur volonté de répression ou de régulation sur la toile.
Et c'est cette opposition frontale aux demandes du Kremlin qui lui vaudra sa première chute. Ainsi, en avril 2014, il refuse non seulement de livrer au FSB les informations de protestataires ukrainiens du Maïdan, mais aussi de fermer la page de l'opposant politique Alexeï Navalny. Pour cela, il est mis à la porte de son entreprise, reprise par l'oligarque proche de Vladimir Poutine Alicher Ousmanov, puis, en 2021, par Gazprom.
Pavel Durov est lui indemnisé, à hauteur de 50 à 100 millions de dollars et doit quitter le pays, pour s'installer aux Émirats arabes unis, à Dubaï. « J'ai refusé publiquement de coopérer avec les autorités. Elles ne peuvent
pas me supporter » expliquait-il alors.
2013, l'aventure Telegram commence
Mais si Pavel Durov rejoint le célèbre émirat, dont il a obtenu la nationalité, ce n'est pas seulement pour jouir du magot qu'il a encaissé avant son départ. Un an avant déjà, le 14 août 2013, il lançait avec son frère Nikolaï l'application de messagerie Telegram. Un lancement effectué, il faut le rappeler, quelques mois à peine après les révélations d'Edward Snowden sur les écoutes mondiales menées par les États-Unis.
Se positionnant à contre-courant des grands acteurs américains du numérique, Telegram affirme alors qu'il ne transmettra jamais les données de ses utilisateurs. Ce qui très vite lui amène un lot important de polémiques. Ainsi, après les attentats du 13 novembre, la messagerie est accusée d'avoir laissé les terroristes de Daesh utiliser la plateforme en toute connaissance de cause, des accusations de laxisme émise de manière similaire en Russie. Pavel Durov répondait alors sur le ton de la plaisanterie qu'il serait peut-être nécessaire « d'interdire les mots. »
En 2018, Telegram traverse sa première grosse crise, quand un tribunal de Moscou ordonne son blocage, suite à son refus de livrer au FSB les clés de chiffrement permettant de lire les échanges des utilisateurs. L'État russe met alors de gros moyens pour imposer ce blocage, au point de perturber l'internet du pays. Mais rien n'y fait, Telegram tient debout, et en 2020, la mesure de blocage est levée.
Pavel Durov, l'excentricité sans fin
Entretemps, Pavel Durov s'est créé une image faite d'excentricités en tout genre, comme les gourous de la tech savent si bien le faire. En plus de s'affirmer libertarien, le milliardaire explique au fil des années être aussi pastafarien, mouvement connu pour sa critique parodique de la religion, et admirateur de Che Guevara.
Il explique par ailleurs avoir adopté un régime alimentaire très strict, excluant l'alcool, le café, la viande, les médicaments, puis à partir de 2018, le gluten et les produits laitiers. Il ne mangerait plus depuis 2019 que du poisson, et aurait même, selon ses dires, essayé d'effectuer un jeûne d'un mois. Toujours d'après ses dires, il aurait aussi multiplié les dons de sperme à travers la planète, ce qui ferait de lui le père biologique d'une centaine d'enfants.
L'homme qui aime afficher un physique très dessiné sur son compte Instagram s'est aussi laissé quelques fois allé à des déclarations à l'emporte-pièce. Évoquant les attentats de 13 novembre, il avait ainsi considéré que le gouvernement était autant responsable que Daesh pour ces attaques. L'État « prend l'argent des travailleurs français avec des impôts scandaleusement élevés et le dépense pour mener des guerres inutiles au Moyen-Orient et pour créer un paradis social parasitaire pour les immigrés nord-africains » affirmait-il alors sur Instagram. Ce qui ne l'a pas empêché depuis de développer des relations plus que cordiales avec Emmanuel Macron, grand utilisateur de Telegram, et même d'obtenir la nationalité française en 2021 via une procédure qui reste à ce jour très opaque.
Pause ou fin de partie pour le golden boy russe ?
Ironie de l'histoire, c'est justement dans ce pays qu'il a souvent critiqué, mais dont il est devenu un national il y a maintenant trois ans, que l'homme d'affaires connaît le moment le plus difficile de sa vie. Après une garde à vue qui aura duré plusieurs jours, il a vu cette mesure être levée aujourd'hui (mercredi 28 août 2024). Il a depuis été transmis à la justice, et pourrait en conséquence être mis en examen dans la foulée.
Pour rappel, la justice française l'accable de pas moins de 12 chefs d'accusation, allant de la complicité de crimes grave à l'association de malfaiteurs, en passant par le refus de coopérer avec les demandes des autorités, malgré les habilitations données par la loi. Le franco-émirati-russe pourrait donc faire de la prison préventive pendant un temps plus ou moins long. Un temps qui pourrait entraîner la désorganisation des équipes de Telegram, dont il est le maillon central, mais aussi une perte de confiance des utilisateurs, pour qui la promesse de la confidentialité pourrait s'évanouir du fait d'une coopération entre Pavel Durov et les autorités françaises. Alors, l'application Telegram a-t-elle encore de l'avenir avec son fondateur installé dans une prison de l'hexagone ?
- Fonctions sociales
- Nombreuses options de personnalisation
- Les appels vidéo à 30 intervenants
Source : Le Monde, Daily Mail, Business Herald