Proche de Wall Street, Alibaba devra réussir à l'international

Thomas Pontiroli
Publié le 07 mai 2014 à 12h26
Le document d'introduction en bourse d'Alibaba est sur le bureau de la SEC, qui validera son entrée à Wall Street. Sans partage sur le marché chinois, le e-commerçant devra convaincre le reste du monde.

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L'entrée en bourse du plus gros e-marchand du monde se précise. Le groupe chinois Alibaba, qui a choisi Wall Street, a déposé son document F-1 auprès du gendarme des marchés financiers américain. Si la société, fondée par l'ancien professeur d'anglais Jack Ma en 1999, n'a pas encore tranché entre le NYSE ou le Nasdaq, elle anticipe une levée de fonds de 1 milliard de dollars. L'opération sera menée par les banques Credit Suisse, Deutsche Bank, Goldman Sachs, JPMorgan, Morgan Stanley et Citigroup.

Mais selon plusieurs analystes le montant levé par le e-commerçant dépassera largement la somme indiquée, pouvant atteindre jusqu'à 15 milliards de dollars. Cela ferait de cette entrée en bourse la deuxième plus grosse de l'histoire derrière celle de Facebook en 2012, avec 16 milliards de dollars. Alibaba ne précise pas combien de titres seront émis, ni à quelle valeur. Une fois cotée, sa valorisation atteindrait 200 milliards de dollars, dans le scénario le plus optimiste. Ce serait presque autant qu'Amazon (137 milliards) et eBay (65 milliards) réunis.

Le volume d'affaires réalisé sur les différents sites du groupe (Alibaba.com, Taobao et Tmall) approche les 250 milliards de dollars en 2013, grâce à 231 millions de consommateurs actifs qui achètent en moyenne une cinquantaine de produits par an. Sur le mobile, Alibaba compte 37 milliards de dollars d'achats, avec 136 millions de consommateurs réguliers, de quoi capter, à lui seul, les trois quarts du m-commerce chinois.

Un succès d'abord chinois

Parmi les relais de croissance retenus dans son document F-1, Alibaba cite en premier lieu la réserve de consommateurs en Chine. Selon un rapport du China Internet Network Information Center, le commerce en ligne dans le pays est largement sous représenté avec 302 millions de consommateurs recensés en 2013 alors que le nombre de personnes accédant à Internet est de 618 millions. Un retard qu'Alibaba espère combler grâce au mobile. Ici aussi, la Chine est numéro un avec 500 millions de mobinautes dénombrés à fin 2013.


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Le e-commerçant entend aussi pallier le manque de points de vente et l'incapacité des magasins existants à couvrir l'ensemble des besoins de la population chinoise, étendue sur un vaste territoire. Alibaba souhaite s'appuyer sur la modernisation des infrastructures logistiques de la Chine pour y étendre sa présence. Et les indicateurs sont tous au vert. Avec un taux de pénétration de 8% seulement, le e-commerce en a sous le pied. Il devrait croître à un rythme annuel de 27% jusqu'en 2016 - contre 13,5% en France l'année dernière.

Le potentiel de croissance sur son marché local est acquis, et cela permet à l'entreprise de Jack Ma d'afficher de très bons résultats : Alibaba a amélioré son chiffre d'affaires 2013 de 73% sur un an, à 5,6 milliards de dollars. Et son bénéfice net a atteint 1,4 milliard de dollars. La société a dépensé plus de 600 millions en recherche et développement et plus de 580 millions de dollars dans le marketing et la communication.

Le défi de l'international

Alibaba a choisi Wall Street et non Hong Kong, ce qui marque la volonté d'internationalisation du groupe. Nul doute que les investisseurs seront attentifs aux résultats hors-Chine... car il est encore très dépendant de son marché local, où il réalise 84% de ses ventes - elles n'ont pesé que 670 millions de dollars à l'international en 2013, où Alibaba opère via son site dédié, AliExpress. Mais le Chinois a d'autres cordes à son arc.

Conscient que l'une des plus grandes batailles dans le e-commerce aujourd'hui se situe sur le terrain de la logistique, le groupe chinois a pris une participation importante, en août 2013, dans ShopRunner, un spécialiste américain de la livraison rapide. De quoi espérer tenir la dragée haute à Amazon Premium et eBay Now. Deux mois plus tard, Alibaba a créé un fonds d'investissement en plein cœur de la Silicon Valley.


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Malgré cela il sera très compliqué pour Jack Ma et sa société de venir bousculer des acteurs bien installés. Cet élément, combiné à la défiance des marchés envers les valeurs technologiques depuis le début 2014, en raison de leurs craintes sur une potentielle bulle, pourrait calmer les ardeurs du e-commerçant. D'autant que les dernières introductions boursières de sociétés chinoises comme Weibo, le Twitter chinois, ou 58City, sorte de Craigslist, ont été négatives. Ces deux sociétés cotent à 6% et 8% sous leur valeur d'introduction.

Alibaba continuera d'investir

Alors que des sociétés comme Twitter ou Criteo sont sanctionnées en bourse en raison de leur manque de rentabilité, Alibaba a de solides arguments sur ce terrain, avec une marge de 44%. Pourtant le e-commerçant prévient : il a l'intention de continuer à investir dans la mobilité, comme avec Tango, repris pour 215 millions de dollars fin mars, le cloud, le Web-to-store (appelé O2O pour online-to-offline) et la logistique.

Dans sa stratégie, et c'est un point commun avec Amazon, le groupe chinois a placé la diversification de ses activités dans ses priorités. Son objectif est de consolider un écosystème favorable aux ventes de ses plateformes de e-commerce. Il a créé son propre système d'exploitation mobile en 2011 (Aliyun OS) puis injecté 200 millions de dollars dans ce projet l'année d'après. Alibaba a aussi dépensé 586 millions de dollars dans Weibo et son demi-milliard d'utilisateurs. Dominant en Chine dans les paiements Internet avec Alipay, le groupe a aussi investi dans le YouTube local, Youku Tudou, et dans les voyages en ligne avec Qyer.


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Alibaba avertit également que sa « philosophie opérationnelle pourrait influencer négativement ses performances financières à court terme », et qu'il n'est pas certain de parvenir à monétiser son audience mobile, un canal au centre de l'attention. Si son taux de croissance fulgurant peut séduire les investisseurs, Alibaba rappelle qu'il sera difficile pour lui de maintenir un tel rythme de croissance dans la durée.

En interne, le patron d'Alibaba prend moins de pincettes et provoque même ses futurs actionnaires. Dans une note diffusée à ses employés, il décrit Wall Street comme « une station pour faire le plein d'essence en vue d'ambitieux développements futurs ». Et Jack Ma ajoute qu'il compte bien maintenir son « principe de servir d'abord les clients, les employés en deuxième et les actionnaires seulement en troisième ».


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