Un décollage de satellites Starlink depuis Vandenberg © SpaceX
Un décollage de satellites Starlink depuis Vandenberg © SpaceX

Devenus habituels pour les observateurs, les décollages de Falcon 9 avec Starlink ne génèrent plus tant de discussions que cela. Mais ce 11 juillet, un lot de 20 satellites n'a pu atteindre son orbite nominale à cause d'un échec moteur. Condamnés, les satellites ont été désintégrés dans l'atmosphère, tandis qu'une enquête est ouverte.

Stupeur, après plus de 330 succès d'affilée, la fusée considérée comme l'une des plus fiables au monde a souffert d'un important revers lors de la mise en orbite d'un lot de satellites Starlink, le 11 juillet dernier.

Falcon 9, qui avait décollé du site californien de Vandenberg une poignée de minutes plus tôt, avait pourtant grimpé vers l'orbite dans une normalité devenue aussi routinière que bi-hebdomadaire.

Un vol qui n'a pas fini comme prévu

Le premier étage, après un peu plus de 2 minutes de poussée, était revenu se poser au large dans le Pacifique, sur sa barge automatisée, tandis que l'étage supérieur emportait les satellites vers l'orbite. Cette accélération s'est faite en deux temps : une première poussée pour atteindre une orbite elliptique de 135 x 300 kilomètres environ, puis un très court rallumage (moins de 2 secondes) pour circulariser l'orbite et éjecter les satellites, qui rejoignent ensuite leur place attitrée au sein de la constellation Starlink par leurs propres moyens.

Mais si la première poussée a été réussie, une fuite et la formation de glace à l'extérieur de l'étage étaient déjà visibles sur la caméra embarquée de Falcon 9. Le rallumage du moteur a échoué, et le Merlin 1D VAC (adapté au vide) s'est désintégré. L'orbite basse initiale étant déjà atteinte, les équipes ont ensuite tenté d'éjecter les satellites en reprogrammant en urgence leur propulsion électrique-ionique pour qu'elle délivre la plus grande puissance possible. Hélas, cela n'a pas suffi, avec un périgée à seulement 135 kilomètres d'altitude, ils ne sont restés que quelques heures autour de la Terre.

C'est un lot de 20 satellites Starlink V2 Mini, dont 13 équipés pour les liaisons directes avec les smartphones, qui ont été affectés par cet échec © SpaceX
C'est un lot de 20 satellites Starlink V2 Mini, dont 13 équipés pour les liaisons directes avec les smartphones, qui ont été affectés par cet échec © SpaceX

Un événement rare et cher

Cet échec en vol est le tout premier du genre (échec de l'étage supérieur) sur Falcon 9, qui a subi très peu de catastrophes en 14 années d'activité. Ses deux grands ratés s'arrêtaient il y a quelques jours à la désintégration en vol du cargo CRS-7 pour l'ISS en 2015, puis à l'explosion lors d'un essai au sol avec le satellite Amos-6, déjà sous sa coiffe en septembre 2016. Mais depuis, il n'y a eu que des succès de mission.

Le rythme n'a fait qu'augmenter, et ceux qui pensaient qu'un échec adviendrait inévitablement à cause de la réutilisation ont eu tort. Au fil des années, Falcon 9 a connu quelques pannes non critiques, un moteur qui s'éteint quelques secondes trop tôt, un étage incapable de se désorbiter… Rien de comparable à la perte « sèche » de ces 20 satellites (dont 13 liés à la connectivité directe avec les smartphones) à cause d'une fuite d'oxygène liquide.

L'enquête démarre...

La FAA, l'autorité américaine en charge de l'aviation et du spatial, a ouvert une enquête (c'est une procédure standardisée) et épaulera SpaceX pour découvrir les causes et conséquences de ce problème. Après plus de 330 succès d'affilée, dont 68 cette année, il ne s'agit sans doute pas d'une erreur de conception pour l'étage supérieur de Falcon 9.

Erreur humaine, problème de production, SpaceX va s'attacher à comprendre et à corriger rapidement cette erreur, qui n'affecte pour l'instant que l'entreprise elle-même, mais que ses très nombreux clients observent de près. Falcon 9 est en effet le lanceur orbital le plus sollicité, et les États-Unis comme une partie du monde comptent sur lui pour envoyer des satellites, des sondes spatiales au long cours et, bien entendu, des astronautes.

Ainsi, la NASA a d'ores et déjà annoncé que les équipes de SpaceX communiquaient amplement à propos de cet échec en vue des prochains décollages de cargos pour l'ISS, mais aussi des équipages. Le prochain tir de Crew Dragon avec des passagers est pour le moment toujours prévu pour la fin du mois avec la mission Polaris Dawn, tandis qu'une rotation d'équipage pour l'ISS est programmée le mois prochain.

Les équipes des différents partenaires vont se coordonner pour échanger les données de l'enquête, comme pour le retour en vol © NASA

Quelles conséquences pour cet été ?

SpaceX va probablement souffrir de quelques retards sur son impressionnante cadence de lancement qui avait dépassé les 10 tirs par mois tout au long du premier semestre. Pour autant, la longue litanie de décollages de Falcon 9 sera-t-elle retardée plus de quelques semaines ? Tout va dépendre de l'enquête, et surtout de ses conclusions.

Il y a plusieurs étages supérieurs déjà produits ou à différents stades de finition actuellement (l'usine de Hawthorne en produit un tous les 2 à 3 jours), s'il fallait pour une raison ou pour une autre les rapatrier pour les modifier, cela prendrait du temps. L'entreprise a tout à gagner à communiquer et à boucler l'enquête sérieusement, pour pouvoir reprendre les vols sur une suite de succès. Et avec ses propres satellites Starlink à lancer, même s'ils représentent un intérêt économique certain pour l'entreprise, SpaceX est dans une position avantageuse pour tester ses éventuelles modifications sans pénaliser de client extérieur.

Quoi qu'il en soit l'entreprise ne perdra pas de temps. C'est déjà le cas en Floride : en attendant la reprise des vols, les équipes en charge des sites de lancement ont travaillé ce week-end sur les installations sol.

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Source : SpaceNews