Clotilde de Mersan : Yahoo à l'heure du payant

Jérôme Bouteiller
Publié le 19 août 2002 à 00h00
JB - Clotilde DE MERSAN, bonjour. En quelques mots, pourriez-vous présenter votre parcours ?

CdM - Bonjour. Je fais partie des anciens de France puisque j'ai intégré la société en Avril 1998, il y a déjà plus de quatre ans. Je me suis occupé dans un premier temps du lancement du service marketing et communication puis j'ai rejoins le pôle Business Developpement Europe pour développer cette activité en France. Après avoir passé un magistère de Communication et Marketing au Celsa, j'ai travaillé pendant 3 ans pour le groupe 3M en tant que responsable de la Communication Institutionnelle de la filiale française et 1an pour une filiale du groupe Dassault à New York en tant que responsable Marketing pour une gamme de système de paiement électronique.

JB - Votre nouveau PDG, Terry SEMEL, semble vouloir limiter la dépendance de Yahoo à la publicité. Quels sont vos objectifs pour la France ?

CdM - Effectivement, Yahoo a annoncé dès 1999 sa volonté de réduire sa dépendance à la publicité. Terry Semel a fixé un objectif de 40 et 50% du chiffre d'affaires de Yahoo avec des services non publicitaires pour 2004. Ces derniers sont d'une part les services "premium", destinés au grand public et aux PME et d'autre part, "Yahoo Enterprise Solution" qui consiste à proposer des portails aux grandes entreprises. Cet objectif est annoncé au niveau mondial et la France devrait l'atteindre un peu plus tard.

Je tiens tout de même à préciser que cela ne signifie pas une remise en cause du modèle publicitaire pour lequel nous gardons toute notre confiance. Nous entendons simplement avoir des revenus récurrents, plus stables et moins soumis aux aléas de la conjoncture économique.

JB - Lycos, Free ou iFrance proposent déjà, depuis plusieurs mois, des services premium en matière de messagerie ou d'hébergement. Quand et à quel prix seront proposés les services de Yahoo France ?

CdM - Il faut tout d'abord rappeler que notre objectif n'est pas de faire payer des services gratuits mais de proposer de nouvelles fonctionnalités, adaptées à des applications internet comme la messagerie ou l'hébergement. Nous proposons ainsi Yahoo Stockage Plus, des formules permettant d'étendre à 10, 25, 50 ou 100 Mo les capacités de Yahoo Mail contre 6 Mo pour la version gratuite. Ce service a été lancé mi-juillet en France et nous axons notre communication essentiellement sur les utilisateurs qui consomment plus de 80% des capacités de leur messagerie.

En matière d'hébergement, Yahoo France n'a pas souhaité importer le service Yahoo Geocities pour deux raisons. D'une part parce que nous estimons que le marché français est déjà très structuré avec des acteurs comme Multimania, iFrance ou Chez et d'autre part parce que l'environnement juridique est trop difficile pour les hébergeurs et demande beaucoup de capacités en matière de surveillance. Par contre, nous n'excluons pas le lancement d'un service payant avec lequel il est plus facile d'identifier l'utilisateur. A moyen terme, nous pourrions lancer des packs à l'intention des PME proposant de l'hébergement, le référencement et éventuellement le nom de domaine.

JB - Yahoo US a racheté HotJobs pour les offres d'emploi et propose également des services de rencontres payants (Yahoo Personnals). Les petites annonces seront elles un axe important de votre développement ?

CdM - Les petites annonces sont effectivement un domaine très intéressant pour le développement de nos services premium. Cela marche bien en France et le consommateur est habitué à payer pour diffuser son annonce, notamment via le minitel. Un service comme Yahoo Personnals serait ainsi très profitable et nous regardons ça de très près.

JB - Yahoo est historiquement un outil de recherche. Pourquoi ne proposez vous par des outils à valeur ajoutée comme le fait webhelp ?

CdM - Aujourd'hui, nous avons plutôt mis en avant le référencement payant avec 'Yahoo Express' ou des partenariats avec eSpotting en Europe, dans une optique BtoB. Nous n'avons donc pas la volonté de nous lancer sur ce créneau car ce type de métier est trop gourmand en ressources humaines. A priori, cela ne correspond pas au principe d'applications en ligne de Yahoo

JB - PressPlay est partenaire de yahoo.com. Quels sont les objectifs financiers de ce service ? Ouvrira t'il bientôt en France ?

CdM - Yahoo a effectivement un accord avec PressPlay avec la volonté de l'étendre au niveau Européen. Pour des raisons de clarification des droits, c'est un sujet encore un peu difficile. Les législations sur le droit d'auteur sont plus complexes en Europe et en France qu'aux Etats-Unis. Nous essayons donc de clarifier ces questions avant tout lancement. Le sujet ne sera pas rêglé avant la fin de l'année 2002 en tout cas.

JB - Présent au lancement du wap, Yahoo n'a pratiquement proposé aucun service de personnalisation par SMS. Allez vous développer de nouveaux services payants pour les mobiles comme le téléchargement de jeux java, de eBooks ou le stockage photo MMS ?

CdM - Il faut bien comprendre que nous avons une double stratégie. D'une part, une stratégie qui consiste à lancer des services complétement intégrés où Yahoo maîtrise le contenu, la tarification et la relation client et qui sont des services assez longs à mettre en place. D'autre part, une stratégie pragmatique consistant à saisir les opportunités en attendant de disposer des services intégrés. Il se trouve que certains éditeurs ont du contenu à valeur ajoutée que Yahoo France peut distribuer à ses utilisateurs à la condition que ces derniers respectent notre charte de qualité. Mais à long terme, l'objectif reste d'intégrer ces services à nos plate-formes.
En matière de logos et sonneries, nous travaillons ainsi avec Digiplug qui constitue une option "pragmatique" afin de générer des revenus et habituer nos utilisateurs à payer pour consommer des services de ce type.

Toutefois, nous avons également annoncé une prise de particiaption dans Sonera Zed avec une option pour monter à 100% du capital de cette société qui est un des leaders européens en terme d'innovation pour toutes les applications mobiles : sms, mms, wap. Très clairement, Yahoo va passer à la vitesse supérieure avec Zed qui dispose d'une cellule marketing très active et d'accords de facturation directe avec 17 opérateurs mobiles.

JB - Comment se porte Yahoo PayDirect aux USA ? Quand est-ce que ce concept sera introduit en France ?

CdM - Avant de tout, il faut bien comprendre qu'il n'y a pas un seul outil de paiement sur Yahoo. Nous avons une plate-forme complète qui propose la solution de paiement la plus appropriée à chaque service. Pour les paiement récurrents, nous avons ainsi développé un outil qui s'assure que la paiement a bien été effectué, que nous relançons au bon moment nos utilisateurs et que le service s'interrompt au jour dit. Pour les paiements à l'acte, nous disposons également de nombreux outils comme le support de la carte bancaire, de l'audiotel et biensûr Yahoo PayDirect.

Yahoo PayDirect est avant tout un moyen de paiement interpersonnel parfaitement adapté aux enchères entre particuliers (ce qui explique le rachat de Paypal par eBay) et non un porte-monnaie virtuel bien que nous développions une version pour faire des micro-paiements grâce au soutient de la banque HSBC qui garantit les flux financiers qui transitent sur cet outil.

La plate-forme de paiements est désormais présente en Europe et nous l'ouvrons aux spécificités locales comme le SMS+. Toutefois, le système bancaire européen n'ayant rien à voir avec le système américain, il n'est pas possible de répliquer tel quel un outil comme Yahoo PayDirect pour le moment.

JB- Quitte à se développer dans le domaine bancaire, pourquoi ne pas lancer une monnaie Yahoo ?

CdM - Nous avons proposé il y a quelques années des "points Yahoo", dans un esprit non pas de monnaie virtuelle mais de points de fidélisation. C'est encore une fois un sujet très complexe sur le plan juridique. Nous avons décidé prudemment de ne pas poursuivre l'aventure.

JB - Les opérateurs mobiles ou les fournisseurs d'accès disposent de portails web et établissent depuis longtemps une relation de facturation avec leurs clients. Yahoo sera t'il concurrent ou complémentaire des services des opérateurs ?

CdM - Yahoo est un acteur a part entière et a intérêt à contrôler la relation client. Suite à un accord aux USA avec SBC, un opérateur haut et bas débit, nous allons proposer un service d'accès conjoint, qui couple l'accès internet avec les services premiums de Yahoo. L'une des parties importantes de cet accord est la possilbité de gérer une relation de facturation directe des clients. Ce n'est pas quelque chose qui restera sur le territoire américain et nous recherchons activement des partenaires européens et asiatiques pour dupliquer ce modèle. L'accès à internet devient donc quelque chose de stratégique pour Yahoo.

Contrairement aux portails des fournisseurs d'accès, souvent installés comme page par défaut, Yahoo est plébiscité par les internautes pour la qualité de ces services. Nous souhaitons conserver cette relation de confiance y compris en matière de services payants. Nous serons en compétition avec les fournisseurs d'accès mais notre objectif reste de fournir le meilleur service aux utilisateurs. C'est clairement un chantier très intéressant.

JB - Clotilde de Mersan, je vous remercie.
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