Ariane 6, la belle de nuit ! Photo prise lors des derniers essais réussis, en octobre © ESA/CNES/Arianegroup/CSG/S.Martin
Ariane 6, la belle de nuit ! Photo prise lors des derniers essais réussis, en octobre © ESA/CNES/Arianegroup/CSG/S.Martin

Les essais se poursuivent, en particulier au Centre Spatial Guyanais, mais de nombreuses équipes peaufinent les équipements de demain. Au menu ? L'étage supérieur Phoebus et ses gains de performances, le futur moteur réutilisable Prometheus qui passe de nouvelles étapes, et Arianegroup, qui prépare Susie.

Le secteur des lanceurs européens traverse une crise, et les vagues ne se calmeront que lorsque les fusées pourront de nouveau voler régulièrement, avec l'efficacité qui fut celle du continent durant quatre décennies. Mais au-delà du feuilleton autour de la saga Ariane et de sa sulfureuse cousine Vega, les travaux de développement se poursuivent en coulisses. Pour Ariane 6, cela va se traduire en plusieurs vagues d'évolutions, qui vont améliorer ses performances sans nécessairement augmenter les coûts.

Du concret avec Phoebus

Il y a l'introduction attendue de nouveaux boosters auxiliaires à poudre plus grands (les P160)… mais aussi l'étage supérieur Phoebus, actuellement en développement via une équipe commune de l'ESA, ArianeGroup et MT Aerospace. Cet étage de fusée, qui remplacera à partir de 2026-2028 l'actuel deuxième étage d'Ariane 6, dispose de réservoirs et d'une structure spécifique en fibre de carbone, ce qui le rendra plus léger et présage de bien meilleures performances (on évoque un gain supérieur à une tonne de charge utile) !

Reste que Phoebus est un projet expérimental, il faut donc une longue séquence de tests. Bonne nouvelle, ces derniers peuvent commencer, car un premier réservoir prototype de deux mètres de diamètre est prêt pour une campagne d'essais étendue. Les équipes sont particulièrement attentives à leur résistance en conditions cryotechniques, pour qu'ils puissent accueillir de l'hydrogène liquide (la plupart des alliages de fibre de carbone « classiques » ont des problèmes face au froid extrême). Il s'agit d'un domaine innovant, un seul autre lanceur de l'envergure d'Ariane 6 envisageant des réservoirs en carbone est lui aussi en cours de développement. Il s’agit du Neutron de Rocket Lab.

Le réservoir de test en composite carbone pour Phoebus. Plus complexe qu'un « simple » container... © ESA
Le réservoir de test en composite carbone pour Phoebus. Plus complexe qu'un « simple » container... © ESA

Du réutilisable avec Prometheus

Un autre terrain que les Européens souhaitent ardemment explorer, c'est celui de la réutilisation des étages principaux. Pour cela on le sait, l'ESA s'est engagée sur plusieurs programmes dont l'élément central est toutefois le moteur méthane-oxygène liquide Prometheus. Ce dernier a été allumé pour la première fois il y a quelques mois (le 22 juin), mais c'est en octobre qu'il a réussi son test le plus prometteur pour l'instant, un allumage suivi par 30 secondes de poussée, avant une extinction prévue et un ré-allumage ! Des progrès qui paraissent discrets, mais tout est à faire en Europe sur le sujet. Les équipes d'Arianegroup affirment préparer en parallèle le démonstrateur Thémis en vue de ses premiers « sauts » avec un moteur Prometheus prévus à partir de l'année prochaine à Kiruna, en Suède. Malgré tout, aucune date n'est annoncée pour ce programme déjà très en retard. Il s'agit de préparer le futur à moyen ou long terme…

Du progrès avec Susie ?

Arianegroup a également choisi de montrer ses progrès avec le programme Susie ( Smart Upper Stage for Innovative Exploration), dévoilé l'année dernière et qui reste à ce jour un concept, encore non financé par les instances européennes. Susie, qui est à la fois un deuxième étage de lanceur réutilisable, une option pour une capsule habitée ou cargo et une navette autonome, sera (si le projet se concrétise) capable de se poser seul à la verticale et sans parachute. C'est cet aspect en particulier que les équipes ont choisi de tester en élaborant une maquette chargée de valider les modèles, et notamment les surfaces de contrôle de vol atmosphérique.

Une manière aussi de préparer le terrain, à quelques jours des réunions ministérielles de l'ESA, en montrant que le projet Susie se base sur du concret et non sur quelques diapositives Powerpoint. Cela suffira-t-il à convaincre les États dans un contexte tendu ? Rien n'est moins sûr. Mais les différentes instances, ESA en tête, ont raison de poursuivre le développement, on sait déjà qu'Ariane 6 va pouvoir évoluer et améliorer ses éléments majeurs plus simplement qu'avec la génération précédente. Si seulement elle pouvait voler…

Source : ESA